le 15/05/2010 vers 23h30
&

J’étais exténué, à bout de force mentalement. Dire que je n’avais pas eu peur aurait été un mensonge. J’avais senti que nous y avions échappé de peu. Peut-être que la prochaine fois, cela ne se passerait pas aussi bien qu’aujourd’hui. Etant ange, je me sentais comme responsable de toutes ses horreurs. Mais comment y échapper ? Là était la question. Après l’échange avec cet ange maléfique, nous avions tous donné de notre personne pour aider les blessés qui nous entouraient. Chacun s’était senti désolé de son inactivité pendant la discussion. Pour ma part, j’avais aidé à sortir les personnes des décombres en soulevant des morceaux de tôle, enlevant des fils électriques, dangereux et mortel pour les humains. Et franchement, il était une heure assez avancée de la nuit, assez tard pour que je me sente vraiment mal. Cette histoire m’avait complètement minée l’esprit. A présent, je passais mon temps à essayer de trouver des solutions à cet imminent problème. Nous allions surement nous réunir encore. Tant que nous le pourrions.

C’est en pensant à tout cela que j’avais pris le chemin de la maison. Je sortais les clés de ma poche et m’apprêtait à rentrer chez moi pour dormir quand quelque chose me vint à l’esprit. Miho ! Je plaquais ma main devant ma bouche, conscient que j’avais failli l’oublier ! Je me frappais le front. Il fallait VRAIMENT que je sois perturbé pour que j’oublie que j’avais demandé à ma petite amie et protégée de se réfugier chez ma voisine (et accessoirement copine de mon meilleur ami). En quelques enjambés, je me retrouvais donc devant sa porte et frappais doucement. En attendant que quelqu’un m’ouvre, je me passais une main dans mes cheveux…pour m’apercevoir que j’étais dans un sale état…Physiquement. Aucune blessure bien sur, mais j’étais couvert d’une épaisse couche de suie blanche, poussières des décombres probablement. J’avais des tas de trucs dans les cheveux, petites particules de matières. Je ronchonnais vaguement, je détestais avoir les cheveux sales. Encore plus devant des gens. Encore plus devant ma protégée. Miho m’ouvra. Miwa devait être en train de dormir probablement, ou de s’inquiéter pour Chul Hei. En voyant la jeune japonaise, je ne pus que ressentir un immense soulagement…Mêlé à un sentiment de gratitude immense. Elle était là…c’était fini pour le moment. Elle était là et c’est tout ce qui comptait à présent. Instinctivement, mes bras l’entourèrent pour venir retrouver la chaleur de son dos et je me baissais pour la prendre dans les bras, mon nez se retrouva contre sa nuque et je respirais son odeur, ardemment. Puis je la prenais par la main en lui chuchotant dans l’oreille.

- Viens chez moi, on sera plus à l’aise pour parler. Je ne veux pas réveiller Hana et Takeru.

Aujourd’hui, plus que d’habitude, je sentais que j’avais besoin qu’elle soit près de moi. Sa présence me rassurait et quand j’étais près d’elle, tout mes doutes s’envolaient l’espace d’un instant. Je n’étais plus perdu, j’avais retrouvé ma lumière.

Aujourd’hui plus que n’importe jour, je comprenais la colère de Miho, son désarroi. Elle m’avait manqué aussi toute l’après-midi et je n’avais cessé de penser à elle durant notre affrontement pacifique avec cette terrifiante ange de l’ouest. C’est pour cela que je ne bronchais pas quand elle vient à me frapper. Au fur à mesure qu’elle avançait, je reculais. Il était évident que ces petites tapes ne me faisaient rien et qu’en fait, je n’avais aucune raison de reculer. Mais je sentais que si je restais de marbre je n’allais pas arranger les choses entre nous. Je me mordais la lèvre en voyant ses larmes couler…je me sentais coupable, affreusement coupable. Il y a quelque temps je m’étais promis de ne plus la faire pleurer, de ne plus lui faire peur ou l’inquiéter. C’était raté. J’écoutais ses reproches. Mais je savais aussi que j’avais mes raisons quand à mes réactions. Elles n’étaient pas toutes aussi irréfléchies qu’elle pouvait le penser. Mais j’attendais, j’attendais qu’elle se calme pour que je puisse lui expliquer. Je sentais qu’elle était encore sous le choc.

Ses réactions aussi me le faisaient sentir puisqu’elle me sauta littéralement dans les bras pour m’embrasser passionnément. Sa bouche s’écrasa sans aucune retenue contre la mienne et le contact avec sa peau fut presque violent. Je répondais à ce baiser plus calmement, plus doucement, prenant le temps d’en ressentir tout les effets. Quand je mettais enfin quelques écarts ...nous étions à bout de souffle. Je posais doucement mon front sur le sien, plantais mes yeux dans les siens et me décidais enfin à quelques explications.

- Tu sais que je n’aurais jamais fait tout cela sans une bonne raison. Mais je m’excuse et tu as raison, j’aurais pu t’avertir, te prévenir de la situation plus en détails.

Je déposais un mini bisou dans ses cheveux et continuais.

- Mais, au vue de ta réaction, je crois que j’ai bien fait de te laisser dans le flou. Si je t’avais dit ce qui se passait vraiment, tu m’aurais encore plus réprimandé quand je serais rentré.

C’était plus sérieux que ça en avait l’air et je voulais qu’elle le sache. Même si je prenais des risques, je ne supporterais pas le moins de monde de voir ma protégée en danger. Et connaissant son caractère, je savais très bien qu’elle n’acceptait pas non plus que je prenne des risques pour elle. Donc j’essayais un peu d’éviter la confrontation. Je savais qu’il n’y avait pas d’autres sujets que celui-ci pour lequel nous pouvions nous quereller.
En me passant une main dans les cheveux, j’y retirais un morceau de plâtre. Que je jetais immédiatement à la poubelle. J’étais vraiment sale. Mais je n’étais pas encore pressé de prendre ma douche. Miho m’avait manqué et je ne comptais pas bouger tant qu’elle ne me ferait remarquer qu’une bonne douche serait la bienvenue. Ou peut être était elle trop occupée pour l’instant pour le remarquer. Je ne voulais pas changer l’ambiance de nos retrouvailles. Mais il le fallait bien. Je pris une grande inspiration. Conscient que ce que j’allais dire aller surement l’empêcher de dormir la nuit. Mais j’étais au pied du mur et je savais que si je ne lui disais pas ce qu’il se passait, elle allait surement se fâcher, ou pire, se mettre en danger inutilement pour en savoir plus. Si ce n’était pas moi, ce serait qui ? Je ne préférais pas y penser et je me méfiais d’un nombre incalculables de connaissances de Miho…non humaine évidemment. Je préférais une amorce en douceur avant d’attaquer dans le trop sérieux.

- Tu as regardé les infos ? Tu as vu ce qui s’est passé à la gare cette après midi ?

Visiblement, ma tentative de commencer les explications en douceur n’était pas du goût de Miho, et, j’en convenais, il valait mieux lui raconter avant qu’elle ne se remette en colère. Et j’en étais persuadé, elle était à fleur de peau. Ses larmes coulant encore le long de ses joues et je les essuyais avec la paume de mes mains. Elle me demanda logiquement donc, ce qu’il s’était passé exactement. Deux fois. Le temps que je reprenne mon souffle, assez pour avoir le temps de formuler les choses. Je savais que la façon de lui présenter les choses allait définir sa réaction. Donc je pris grand soin de ne pas trop laisser paraitre des émotions dans ma voix qui aurait pu lui indiquer à quel point la situation avait était dangereuse.

- Elle a débarqué de nulle part. C’était un ange, un ange très puissant venu de l’occident. A la gare, elle n’y est pas allée dans la discrétion.

Je soupirais une nouvelle fois.

- Elle est responsable de la mort de centaines, voire de milliers de personnes. Tout les anges et les démons ont été attiré par son aura sont venus pour défendre la ville. Elle nous a menacés, spécialement Chul Hei et moi car nous étions les rares anges sur place.

Je m’arrêtais là, désireux de ne pas renter dans les détails, qui risquaient d’effrayer encore plus Miho. D’ailleurs, je plantais mes yeux dans les siens pour y déceler ses sentiments. Je ne voulais pas qu’elle ai peur ou qu’elle se sente en danger. Elle devait continuer à vivre sa vie normalement sans être affecté par ses problèmes. Je ne voulais pas qu’elle puisse regretter cela un jour. Plongé dans mes pensées, j’eu à peine le temps de m’apercevoir qu’elle me tirait par le col de ma chemise pour m’allonger sur le canapé en s’asseyant sur moi. Comme je m’en doutais, elle voulait me faire promettre des choses que j’aurais du mal à tenir. Si la situation devenait plus grave …elle allait le devenir, je le sentais au fond de moi, je me savais capable de l’éloigner pour la protéger. De faire tout ce qui serait en mon pouvoir et en allant contre ce qu’elle souhaitait. Mais une fois de plus, nous venions à peine de nous retrouver et une querelle aurait été malvenue. Surtout que j’avais juste envie de l’avoir auprès de moi pour la nuit du moins. Alors qu’elle m’agrippait la nuque pour un nouveau baiser, elle gratta ses ongles contre ma peau et je frissonnais. En quelques minutes passées, je me sentais fiévreux. Etait-ce du au contre coup des évènements précédents ? Toujours est-il que j’étais bouillonnant. Et puis Miho était assise de façon si …Bref, il me fallut un moment d’égarement pour enlever ma chemise. Arracher est le mot exact car elle était dans un état si piteux que j’en faisais une boule et la jetais directement à la poubelle sans bouger de l’endroit où j’étais. Puis j’attrapais la main de Miho pour y déposer un chaste baiser comme un gentleman le ferait avec une princesse.

- Miho-chan…tu voudrais bien rester avec moi cette nuit ?

Je le savais dès que je posais cette question, mes intentions étaient tout sauf pures mais je ne savais plus très bien qu’est ce qui comptait à présent. Une chose était sure, les choses allaient bientôt changées. J’ignorais comment mais je savais pourquoi. J’avais du mal à admettre ce que nous avions appris un peu plus tôt à la gare. Et si ce que cet ange disait vrai ? Je ne pouvais pas m’y résoudre mais la pensée me hantait tout de même. L’extinction des humains était inconcevable et ressemblait plus à un cauchemar.

- Je ne veux pas te perdre…et avec Chul Hei, on fera tout notre possible pour la stopper. Pour stopper tous ceux qui mettront les pieds à Tokyo…Et nous ne serons pas les seuls.

Alors que je lui demandais prestement de rester à mes côtés pour la nuit, Miho se put s’empêcher d’ironiser avec une question rhétorique. Au début, quand je nous avions fais connaissance, j’avais eu du mal à m’y habituer. Pourquoi poser une question quand on connait soi-même la réponse ? Je n’y voyais guère l’intérêt et ne pouvait m’empêcher d’y grimacer. Elle n’était pas en train de douter de mon intelligence là ? Ce n’est pas quelque chose à laquelle je pensais de toute façon. Bien trop préoccupé par les évènements de cette soirée. Je perdais toute trace de sentiments sur mon visage pour lui annoncer que je ferais en sorte de faire tout ce qui pourrait être en mon pouvoir pour la protéger. Maigre consolation pour une très faible promesse. Je ne pouvais définitivement pas lui promettre que je n’allais pas me mettre me danger. C’était impossible. Mais Miho me stoppa. J’en faisais trop et mon anxiété allait finir par déteindre si elle ne l’avait pas déjà fait. Je me taisais, obéissant. J’essayais de lire en elle, de savoir ce qu’elle pensait de la situation. Puis j’arrêtais. Après tout c’était stupide, si nous arrêtions d’en parler, je devrais au moins faire l’effort de chasser cette histoire de mes pensées pour le moment. D’ailleurs, je fus bien vite occuper par deux baisers que ma protégée m’octroya. Etait-ce pour réconforter mon cœur si troublé ? En tout les cas, c’était diablement efficace. Je la stoppais un instant, son visage en coupe entre mes mains. Je souriais en coin.

- Laisse-moi te regarder encore un peu. Je veux apprendre tes traits par cœur pour ne jamais les oublier.

Y avait-il de la tristesse dans ces paroles ? Je faisais en sorte que ça ne ressorte pas sur le timbre de ma voix car je savais que Miho saurait le déceler et je ne voulais rien gâcher à nos retrouvailles. J’observais attentivement, en oubliant même d’en cligner les paupières parfois. Si son image pouvait se graver sur ma rétine pour toujours j’en serais reconnaissant. J’avais déjà oublié les visages de tas de personnes, je ne voulais pas que cela arrive un jour avec ma seule et unique protégée. Est-ce que ce que je faisais était bien ? Pourquoi il n’y avait jamais eu personne pour me montrer la bonne voie ? Je m’étais posé cette question des centaines de fois mais après tout, je l’avais voulu. Je savais très bien qu’en choisissant d’être ange gardien, personne ne viendrait me dire comment faire la tâche qui m’était donnée. Je caressais doucement les cheveux de Miho et respirais à fond.


[...] Puis je me souvenais que j’étais torse nu. Est-ce que Miho avait été gêné par cette vue ? Je ne savais pas bien au fond et je ne savais pas très bien comment agir. Après tout, même si je sentais que je pourrais l’avoir à mes côtés pour la nuit sans redevenir le monstre démoniaque de la dernière fois. Ce n’était pas à moi de faire mon choix mais bien à Miho. Elle n’avait rien demandé après tout, quand je lui avais sauvagement sauté dessus et elle n’avait jamais été autant en colère et déçue par moi. Je me mordais distraitement la lèvre. C’était malvenu que je prenne les devants. Elle pourrait s’échapper et m’en vouloir encore plus. Je me redressais donc un peu sur le canapé en utilisant mes muscles abdominaux et mes bras, Miho était toujours assise sur moi après tout.

- Tu ne veux peut être pas …enfin …je ne sais pas. Je remets un haut ?

Je me massais la nuque un moment, n’osant plus la regarder.

- J’ai du mal …à dire ces choses là …mais tu comprend ..un peu ?

Je doutais. Peut être qu’elle ne voulait pas les mêmes choses que moi, et cela me mettait mal à l’aise, rien que d’y penser. J’avais donc préféré m’en assurer. Qui sait dans combien de temps nous allions pouvoir le refaire ? Avec les évènements récents, le futur me paraissait encore plus incertain. Mais bien heureusement, le sourire de Miho quand elle me répondit, et ses caresses …semblaient vouloir aller dans la même direction que moi. Je sentis un sourire naitre à mon tour sur mes lèvres. Puis elle s’avança dans une annonce…pour finalement se rétracter. Je faisais la moue un instant, me demandant si je devais la questionner pour en savoir plus sur ce qu’elle n’avait pas voulu me dire. Mais elle promettait qu’elle m’en parlerait plus tard donc je décidais de lui faire confiance. Miho n’avait pas pour habitude de me cacher des choses et si elle ne me le disait pas maintenant, elle devait surement avoir une excellente raison de ne pas le faire. Elle serra ses jambes autour de mon bassin, ce qui eu comme résultat de me faire frissonner avant de me retourner la question si gênante que j’avais osé lui poser. Pour lui répondre je scellais nos lèvres avec un baiser.

- Crois-tu vraiment que je me serais laissé faire si je n’avais pas décidé de me corrompre une nouvelle fois ?

Car oui, je me « corrompais ». J’étais un ange, et je n’étais plus du tout pur. Je m’empêchais tout de même de penser au fait que mon crime était punissable de la pire des façons possibles. Après tout, un ange existe pour aimer Dieu et lui seul non ? Mais j’avais perdu la confiance que j’avais placé en lui, et tout mes espoirs avec. C’est ce dont j’avais fini par m’apercevoir. Je posais un doigt sur Miho pour l’empêcher, au cas où elle aurait voulu répliquer.

- Je t’aime, et c’est tout ce qui compte aujourd’hui d’accord ? Le reste on y pensera la prochaine fois…

Mes mains glissèrent sur le tissu, franchirent cette barrière gênante pour caresser la peau soyeuse de ma bien-aimée. J’embrassais chaque parcelle de son corps, le mettant à nu par la même occasion. C’était doux, et chaud. Et tellement agréable. J’aurais pu m’endormir au creux de ses bras protecteurs. Elle me protégeait à sa façon elle aussi, de la pourriture du monde extérieur, et de mes propres doutes, ma propre colère. Je me contentais de fermer les yeux pour me concentrer sur les terminaisons nerveuses du bout de mes doigts et sur nos frôlements, cette respiration si magnifique qui faisait mon bonheur. C’était une musique si belle qu’elle ne devait jamais s’arrêter. C’était si intolérable, un être si innocent livré dans ce monde. Je ne me sentais jamais à la hauteur de mon devoir de protection et redoutait que personne après moi ne puisse la protéger comme je le faisais à présent. L’amour n’était-il pas la plus belle manière de protéger une personne ? Je l’ignorais, et malgré les menaces, je ne pouvais abandonner…