Spoiler:

Perturbée, déstabilisée, Miho ne savait plus quoi dire ayant demandée à être seule, de toutes les façons, Chisako avait cours après et… elle ne pourrait la revoir que bien plus tard, le temps qu’elle puisse assimiler sans doute, ce qu’elle venait de comprendre. Elle n’eut pas le temps de trop réfléchir, aucune sonnerie ne retenti, après tout ce n’était pas le lycée… le temps semblait figé… et ce qui fit sortir la petite poupée de ses pensées ne fut pas le doux sourire de son bel ange au loin qui l’avait repéré. Pour une fois, ce fut son souffle et sa voix suave dans son dos, lui arrachant un frisson avait qu’elle ne se mette à sourire d’un étrange regard.

Les choses n’allaient pas si mal, elle en avait presque oublié ce lien très fort qui l’unissait à son protecteur qui d’ailleurs l’eut pris par la main sans aucune gêne, sans même se soucier du reste du monde qui pouvait s’offusquer. Miho ne protesta pas, son cœur battant le dévisageant tandis qu’il souriait toujours. Il lui expliqua ce qu’il comptait faire, aucune importance, elle savait qu’elle ne risquait rien à ses côtés, bien au contraire.

La lycéenne n’avait pas ouvert la bouche une seule fois, suivant docilement sans même plaisanter sans tenter quoi que ce soit, elle reprit conscience lorsque la porte de l’appartement se claqua légèrement, la faisant ainsi sursauter. Elle se mordit la lèvre, observant les lieux, détaillant chaque recoin de ses grands yeux avides de connaissance. C’est lorsque Kanon lui permis de visiter qu’elle décida enfin de bouger, allant voir un peu partout pour revenir un peu plus détendue, bien que son pool ne semblait pas de cet avis.

Elle voulut s’excuser pour son absence assez longue, mais se figea en observant le serveur, torse nu. Clignant plusieurs fois de ses mirettes, la demoiselle se mordit la lèvre, ses pommettes prenant littéralement feu à cette vue magnifique et inespérée. Sans prononcer un seul mot, notre petite perverse finit par se retourner avant qu’il ne la voie… ou pas, puis alla s’asseoir comme convenu pour boire leur thé bien chaud. Mais avant, laissant le temps de refroidir un tant soit peu, elle prit la peine de pencher son regard vers le poisson rouge qui n’avait pas l’air malheureux, bien au contraire. Miho s’approcha, observant d’abord Kanon.

« hm… désolé pour mon… absence ! »

Reprenant son sourire, elle posa ses yeux sur le bocal, observant l’animal orangé qui circulait gracieusement en faisant quelques bulles. Bizarrement, il s’amusait… n’oublions pas que les poissons rouges ont une certaine faculté d’adaptation assez incroyable, pour ainsi dire peu importe où pouvait être transporté le bocal, du moment que l’eau était bonne et qu’il avait à manger régulièrement… le poisson n’allait certainement pas se plaindre.

« Salut toi… je sais ce que tu dois te dire… les humains ne peuvent pas communiquer avec les animaux… mais je suis une exception… hm… comment tu t’appelles ? Tu as un nom ou bien… tu attends que ton propriétaire t’en donne un ? »

C’était fou ce qu’elle était étrange, docile, adorable, pourtant elle était… agressive quand un inconnu l’approchait et elle aurait pu, en ayant peur donner un coup de poing au pauvre jeune homme qui voulait simplement attirer son attention, pourtant elle ne l’a pas fait. La petite crapule était vraiment mal à l’aise, elle conversait donc avec le poisson sans que Kanon ne puisse comprendre et prenait un malin plaisir à le faire rager. Elle se mordit la lèvre puis regarda le jeune homme.

« Alors comme ça on parle de moi ? Oh et puis, il faut que tu lui donnes un prénom, il en veut un intelligent… pas pantoufle, ou croquette comme il a vu à la télé, et il aime bien Phileas… c’est sa suggestion. »

L’humaine se releva, saluant le poisson pour finalement regarder le jeune homme et se diriger doucement vers la table, prenant place, enfin. Miho savait parfaitement que l’ange s’inquiétait, elle se contenta de souffler sur la tasse, s’y réchauffant les doigts, tout en contemplant le breuvage, essayant d’éviter les questions, bien qu’elle se doute qu’il allait les poser. Pour cette raison, elle décida d’anticiper.

« Tu connais Chisako ? »

La Mistinguett tapota de ses doigts fins la petite tasse, se mordant la lèvre en faisant une petite grimace, sans pour autant détourner son regard vers le jeune homme. Elle appréhendait en réalité, ne sachant pas ce qu’il adviendrait de ce lien avec sa sœur, ne voulant pas perdre l’unique personne capable de la comprendre un tant soit peu sur la situation familiale et qui plus ait qui partagé un demi de son sang avec elle.

« Eh bien… je… je t’attendais à l’université… j’ai vu Chisako alors on a parlé un peu et puis on a découvert… qu’on avait le même père, mais pas la même mère… »

Autant dire que ce n’était pas facile à dire, mais elle sourit quand même, finissant par observer la réaction du jeune homme, ne voulant pas l’enquiquiner plus qu’elle ne devrait avec ses histoires de famille, bien que parler à quelqu’un d’extérieur à cela pouvait lui faire du bien, elle se refusait à ce que son ange porte également sur ses épaules le poids de ses problèmes, il devait avoir d’autres chats à fouetter et surtout, peut-être qu’elle n’était pas la seule à avoir une vie compliquée.

« Mais, sinon, toi ça s’est passé comment ? Pourquoi tu as tardé autant hm ? Et puis c’était quoi ce murmure, tu m’as donné la cher de poule en t’approchant de moi tout à l’heure ! »

Après avoir visité mon appart, Miho se retourna vers moi et s’excusa de son absence. Bien que je ne comprenais pas bien pourquoi elle s’excusait de ça, j’hochais la tête, silencieusement.

Elle s’approcha enfin de mon poisson et engagea la conversation. En commençant par lui demander son prénom. Mais elle avait parlé à mon attention, parce que lorsqu’elle commença à vraiment parler avec lui, je ne pouvais pas comprendre un traitre mot de ce qu’elle racontait. Mais je restais là, debout. A la fois légèrement déçu que la chose soit moins spectaculaire, et fasciné par la petite poupée.

Elle se retourna enfin vers moi et m’annonça que mon poisson voulait s’appeler « Phileas ». Un prénom bien savant pour un petit poisson. J’haussais un sourcil, amusé de la situation.

- Soit, ce sera donc Phileas.

J’apportais le plateau sur ma table basse et nous primes enfin place sur la banquette. L’un en face de l’autre. Le silence s’installa. Je servais une tasse à Miho et elle s’en empara en soufflant dessus. Je me servais aussi la mienne sans cesser de regarder la jeune nippone.

Elle avait des choses à me dire, j’en été persuadé. Elle finit par briser le silence, finalement de courte durée en me demandant si je connaissais Chisako. En effet ce prénom me disait quelque chose. N’est ce pas une jeune serveuse qui travaillait au restaurant du World’s ?

- Abe Chisako ? Oui je la connais. C’est une collègue de travail.

Miho tapotait sa tasse. Je la sentais anxieuse, troublée. Mais je ne voyais pas du tout pourquoi elle me parlait de Chisako. Autant que je sache, elles n’avaient que leurs noms en commun. Je ne savais même pas qu’elles se connaissaient.

Enfin, elle se décida à parler et me révéla, qu’en m’attendant, elle l’avait croisé, qu’elles avaient discutés…et découvert un lien de parenté de taille. Elles étaient demi-sœurs ? J’étais vraiment surpris. J’avais déjà pensé en toute innocence que ma jeune collègue avait quelques traits semblable à Miho. Mais je n’avais jamais imaginé qu’elles puissent être demi-sœurs !

Ma bouche resta ouverte un quart de seconde, avant que je m’en aperçoive et la referme bien vite. Si moi, j’avais du mal à assimiler l’information, je n’osais imaginer ce que ça devait être pour Miho. Je la regardais en essayant de savoir si elle me cachait son état.

Visiblement c’était le cas puisque, devant mon silence, elle enchaina en me demandant comment c’était passé ma journée et pourquoi j’avais été en retard. Elle me reprocha même de l’avoir effrayé tout à l’heure. J’haussais de nouveau un sourcil, perplexe.

J’esquissais aussi une petite grimace. Ma bouche s’ouvra et se referma plusieurs fois de suite, je cherchais mes mots. J’attrapais ma tasse et prenais une gorgée du thé brulant, pour me donner contenance et cacher le fait que j’étais assez déstabilisé.

- Est-ce que ça va aller ? Je veux dire ….ce que tu viens d’apprendre va changer ta vie. Ça peut être assez effrayant.

Bon c’était vraiment nul. Mais je faisais de mon mieux. Le front plissé, j’aurais voulu pousser la table basse qui nous séparait et venir la prendre dans mes bras en lui disant que tout aller bien.

Je pensais qu’elle n’avait surement pas la tête à ça, et je ne voulais pas qu’elle le prenne mal. Encore et toujours je me donnais de faux prétextes pour que ma raison reprenne le dessus, à mon habitude, je me contentais de la dévorer du regard. Comme ci ça allait me suffire.

Soufflant sur mon thé, il fallait que je parle, car beaucoup trop de choses m’inquiétaient. Notamment le fait que la jeune nippone se retrouvait beaucoup trop souvent seule à mon gout. Mais je ne pouvais à priori pas m’installer chez elle.

- Miho, tu sais que je suis là quoiqu’il arrive hein ? Même si il te prend l’envie de me parler à 3 heures du matin !

Peut être qu’à défaut d’oser la réconforter en la prenant dans mes bras, je pouvais au moins tenter de la faire rire. J’inclinais la tête, un vague sourire sur les lèvres.

- Je suis le fidèle chevalier prêt à tout pour le bonheur de sa demoiselle.

Apparemment, Kanon semblait déçu, elle n’allait pas se transformer en poisson et ne comptait pas non plus parler comme lui ! Mais le poisson lui répondait et ce n’était pas dans un langage humain, c’était assez spécial et pour la peine, ça valait le détour même si c’était assez discret et que personne n’y croyait du fait que ce n’était pas un grand spectacle. Elle était plus ou moins détendue, jusqu’à finalement se retrouver sur la banquette à regarder sa tasse étrangement intéressante, puis à relever sa bouille pour expliquer qu’elle avait une demi-sœur. Elle voyait bien que Kanon ne s’était pas attendu à ça à en juger par son expression. Miho se mordit la lèvre, si elle était perturbée, au moins elle riait un peu de le voir… elle avait besoin de lui, de son amour… de son soutien.

« Tu essaies d’imiter Phileas ? »

Se mordant la lèvre, la petite nippone écouta la question de son ange, qui avait l’air tout aussi perturbé que si c’était lui qui avait appris la nouvelle. Touchée par cette attention, la poupée hocha la tête se sentant déjà bien mieux d’en avoir fait part à quelqu’un, d’autant plus qu’elle ne pouvait se permettre de le dire à sa mère puisque cette dernière aurait encore plus mal que lorsque son amant lui avait annoncé qu’il avait une double vie.

« Eh bien… je pense que ça ira… dans un sens ça… ça me rassure de ne pas être la seule… enfin… de ne pas me sentir seule dans cette pseudo famille que j’ai… mais… mais dans l’autre je m’en veux pour ma mère… je suis amie avec… ma demi-sœur… la… la fille de la femme qui a eu un véritable mariage avec… l’homme qu’elle aimait… hm… ça ne doit pas être facile non plus pour Chisako j’imagine… »

Puis elle releva son visage, souriant tendrement au jeune homme pour qu’il ne s’inquiète pas. Elle mourrait d’envie de lui faire un câlin, mais elle avait largement eu sa dose depuis le temps… alors, elle se résout à rester à sa place, se contentant de le regarder dans les yeux.

« Elle est plus fragile que moi… et ça me fait un peu peur… j’espère qu’elle ne m’en voudra pas… »

Voyant qu’elle ne parlait pas beaucoup et qu’elle devenait très étrange de nouveau, l’ange finit par lui dire que si elle avait besoin de lui, elle n’avait qu’à l’appeler il accourrait en moins de temps qu’il ne faut pour dire ouf. La chose étant assez amusante, la lycéenne rit légèrement. En voilà un autre problème non résolu… il était bien le chevalier, elle était la demoiselle… mais… avaient-ils droit d’être ensemble… au fond, c’était un bon résumé de leur situation.

« Kanon… »

C’était une habitude, si elle ne l’appelait pas pour rien lui dire, elle ne s’appelait pas Miho, c’était certain. Il fallait qu’elle l’embête de cette façon au moins une fois par jour, mais elle préparait en fait ce qu’elle allait lui dire, évidemment elle prononçait son nom toujours un peu trop tôt.

« Merci… »

Ne supportant pas les séquences émotions, d’ailleurs… se sentir comme ça pour elle c’était assez nouveau, elle finit par se lever, contournant la table pour se freiner, qu’est-ce qu’elle faisait ? Elle voulait absolument être contre lui… pouvoir être rassurée… mais elle ne savait plus si elle voulait vraiment ça… légèrement vulnérable en cet instant précis… devait-elle profiter ? Évidemment, non. Sagement, elle retourna à sa place, le cœur lourd, se mordant la lèvre en reprenant sa tasse pour se cacher derrière, buvant tranquillement. Quand elle eut terminé, elle frissonna, posant délicatement la tasse pour regarder par la fenêtre.

« Il… il fait bon chez toi… et puis t’as une jolie vue… et… hm… »

Non ça ne se voyait pas du tout qu’elle ne savait pas quoi dire et voulait changer de sujet ! Mais tout ce à quoi elle pensait quand elle était avec le jeune homme… c’était à l’étreindre pour oublier tous ses soucis… si elle avait pu s’endormir dans ses bras, pour sur elle l’aurait fait, mais Miho ne s’imposait pas, surtout pas dans ce genre de situation… et qui plus est ce serait malpoli. Surprise d’être aussi contrariée de ne pas pouvoir faire le premier pas d’elle-même, elle soupira, reportant son attention sur Phileas.

« Je suis sure que tu mets en doute son intelligence… mais… tu vois, il a du retenir un nom à la télé… ce qui prouve que les poissons rouges ne sont pas idiots, il n’aime pas quand tu lui dis qu’il aura tout oublié après avoir fait le tour de son bocal… »

L’humour ne marchait pas trop, elle se forçait un peu coupant ses phrases tout en regardant un point inexistant fixement. Allait-elle l’abandonner ? Dans ce cas, elle comprendrait, évidemment, mais… elle se sentirait blessée parce que Chisako n’aura pas su voir au-delà de ces rancunes engendrées par leur père.

« Dis… si… tu trouves ça… stupide… de s’accrocher à la moindre personne proche… de moi? »

Heureuse, ça oui, elle l’était, mais elle n’avait jamais subit autant de pression en un mois, sa rencontre avec son ange gardien, le petit ami de sa présumée demi-sœur étant un démon, un démon qui semble être pris d’affection pour elle… et puis cette relation ambigüe avec son ange gardien… les larmes coulèrent sans qu’elle ne s’en aperçoive. Elle avait pourtant vécu bien pire… mais ne pouvait s’empêcher d’avoir mal, d’avoir peur de ne pas savoir comment agir, de faire les mauvais choix et d’être un poids pour les autres comme elle l’était déjà avec sa mère.

Elle me disait qu’elle allait bien mais je voyais bien que ce n’était pas vraiment ça. Elle tenta de plaisanter en me comparant à Phileas mais je voyais bien que je n’avais pas la Miho de d’habitude en face de moi. Il y avait quand même pas mal de trucs qui devait la préoccuper, quoi de plus normal quand on vient d’apprendre une telle chose.

Elle m’appela par mon prénom. J’hochais la tête sans répondre. Elle faisait ça souvent. Et elle me remercia. Encore une fois, la chose était inutile mais je la laissais faire, je n’allais pas la contrarier avec des choses futiles aujourd’hui.

Sur ce, elle se leva, et s’approcha de moi. Est-ce qu’elle allait faire ce à quoi je pensais déjà depuis un bon moment ? Non, visiblement pas, puisqu’elle se rassit rapidement.

Comme si elle venait de faire une bêtise. Elle se cacha derrière sa tasse pour finalement commenter mon appart et la vue.

Reportant son attention sur Phileas, elle m’avoua qu’il n’aimait pas quand j’insinuais le fait qu’il allait oublier ce que je venais de lui dire en faisant le tour de son bocal. Et ce n’était donc pas le cas ? Je grimaçais.

Miho était le sujet principal que j’abordais dans mes discussions avec le poisson ces derniers temps. Ne valait mieux pas qu’elle le sache. Le rouge me monta légèrement aux joues.

- Tu peux lui dire qu’en tant que confident, il doit garder sa langue. Ce que je lui raconte est strictement secret hein ?

Bon encore une blague tombée à l’eau. Dans le genre comique j’étais vraiment mauvais.

Miho me demanda si je trouvais stupide qu’elle s’attache à la moindre personne proche d’elle. Comment aurais je pu dire oui ? Pour moi c’était ce qui rendait la miss si attachante. Il était vrai que cette qualité pouvait aussi lui apporter des ennuis. Mais pour l’instant je ne voyais pas trop ce que cela pouvait bien faire.

-Non non ce n’est pas stupide Miho. C’est…humain.

Soudain je voyais des larmes qui perlaient à ses yeux. Elle était encore sous le choc de la nouvelle. Tout devait être confus pour elle en ce moment.

Sans hésiter, je me levais et j’allais m’assoir à coté d’elle, au ralenti. J’ eu l’impression que ces secondes duraient une éternité.

Enfin assis à ces cotés, je passais ma main sur sa joue un peu maladroitement et essuyais ses larmes. Mon autre main passa dans son dos pour frôler son épaule (qui était dénudée d’ailleurs) et l’encourager à poser sa tête sur mon épaule. Ça aussi ça commençait à devenir une habitude. Un peu trop confortable d’ailleurs.

Instinctivement je fermais les yeux. Essayant de profiter de ces instants au maximum. Face à nous, le ciel commençais à s’assombrir, il est vrai que la vue de mon appart était très sympa. Mais cela me préoccupait peu à cet instant. Ce lien si fort qui nous unissait, Miho et moi, je le ressentais beaucoup. Je sentais à quel point la jeune nippone était déboussolée, perdue. Et inquiète. J’attrapais sa petite main et tentait de lui insuffler un peu de chaleur. Elle était toujours gelée ma parole !

- Je suis désolé. J’aimerais pouvoir faire plus. Mais si cela peut te rassurer, je sais que Chisako est quelqu’un de bien. J’aimerais…

Ma phrase resta en suspens tandis que je me traitais intérieurement d’imbécile. C’est vrai, après ce qu’elle venait de vivre, je continuais avec des « je ». C’était totalement égocentrique et stupide. Qu’est ce que je m’apprêtais à lui dire au juste ? Un truc totalement niais et inutile. Comme d’habitude.

Fallait vraiment que j’arrête de me prendre la tête avec mes désirs et que je me concentre un peu plus sur les siens. A quoi servirait un ange gardien si ce n’est à veiller sur son protégé ? Quel baka ! C’est comme ci j’étais incapable de la moindre pensée rationnelle lorsque nous étions comme ça. Je me redressais brusquement sur le canapé.

- Est-ce que tu veux manger quelque chose ? On peut regarder un film si tu t' ennuis…ou faire..ce que tu veux !

Je me passais la main derrière la nuque, penaud. Décidément je m’y prenais vraiment comme un manche.

Pour le peu d’humour que la demoiselle faisait, ça n’avait pas l’air de rassurer Kanon. Il essayait d’engager la conversation lui aussi sans y parvenir, d’où le fait que Miho parle de Phileas et de ce qu’il lui avait raconté. Elle se mordit la lèvre, le voyant rougir un peu, se demandant ce qu’il avait bien pu lui dire, mais elle n’abuserait pas de sa confiance ni même de celle qu’il devait avoir en son poisson… ou pas.

Cela dit, elle se sentit mal à l’aise parlant de la pluie et du beau temps, avant de verser quelques larmes, s’étant au préalable approché du jeune homme. C’était incroyable, elle ne savait plus où elle en était et se sentait bien stupide vis-à-vis de l’ange. Lorsqu’elle le sentit à ses côtés, elle ne put s’empêcher de se serrer contre lui, ne voulant pas s’apitoyer davantage. Sa main chaude sur son épaule et l’autre sur sa main la firent frissonner. Elle serra sa main dans la sienne, fermant les yeux à son tour.

Le serveur fit une tentative pour la rassurer, en vain, certes, mais elle était déjà plus ape à en parler et à accepter toutes ces choses depuis qu’il était avec elle. La petite poupée était conquise, le voyant bafouiller pour qu’elle ne pleure plus. Elle le regarda de ses yeux noirs un court instant avant de se relever elle aussi, se mettant sur la pointe des pieds pour se blottir contre son cou. Elle savait parfaitement que ce n’était pas correct, du moins qu’il était… familier de se comporter comme ça avec un ange gardien, qui plus est le sien… mais elle en avait besoin.

Une fois calmée, la Nippone chuchota, tout simplement, ayant du mal à quitter l’épaule de son ami, mais c’est ce qu’elle fit après ces quelques mots.

« Merci… merci d’être là pour moi Kanon… je sais pas… ce que je ferais sans toi… »

Si… elle le savait parfaitement, elle aurait pleuré toutes les larmes de son corps et ses craintes n’auraient été apaisées que par la présence de Chisako, encore que si cette dernière ne la portait pas dans son cœur, elle aurait mis un certain temps à accepter, à encaisser cette nouvelle lame plantée dans sa chair. Elle se mordit la lèvre, observant le jeune homme avant de se rasseoir, et de lui sourire.

« Je… hm… c’est comme tu veux… je ne veux pas trop t’embêter tu sais… »

Oui, Miho espérait secrètement qu’il n’avait rien d’autre à faire, ne voulant, une fois de plus, pas s’imposer qui plus est ne pas être un poids. Elle était mal à l’aise, c’était la seconde fois que Kanon la voyait pleurer et se mettre dans tous ces états alors que normalement, elle taisait ses sentiments. Tout était si nouveau…, elle ne comprenait pas pourquoi elle agissait comme ça, pourquoi elle changeait. Plongée dans ses pensées, pendant que le jeune homme lui essayait de trouver une occupation elle s’avança vers le bocal pour avertir Phileas qu’il devait tenir sa langue. Elle sourit, tapant doucement contre la vitre pour qu’il arrête de l’ignorer. Une fois le marché conclu, elle retourna tout simplement à sa place, attendant que Kanon revienne.

Bizarrement, elle était tentée par le canapé, posant docilement sa tête sur ce dernier, fermant ses yeux lentement, se sentant légère comme une plume, la banquette s’étant transformée en matelas très tendre, affreusement tentant tandis qu’elle se mettait à somnoler, luttant contre ses yeux qui se fermaient peu à peu. Son regard était vide, plus un bruit, même pas le temps qui avait viré pour laisser quelques gouttelettes d’eau se heurter à la vitre. La petite poupée était sur un nuage… il ne manquait plus que la présence rassurante de son ange… contre elle. À cette pensée, elle se releva à moitié, clignant plusieurs fois des yeux, les pommettes rouges. Avait-elle osé penser ça ? Elle se mordit la lèvre, se frottant les yeux en se rasseyant, zut ! Elle n’allait pas se reposer de si tôt ! Tant pis, elle s’endormirait contre Kanon devant le film et pour la peine, elle sourit.

« hm… on fait quoi ? »

Dit-elle, se frottant les yeux. Lorsqu’elle les rouvrit, le jeune homme était en face d’elle, assez proche, ce qui lui fit faire un bon, lui arrachant un léger cri. Elle le fixa, les yeux grands ouverts, il n’avait pas bougé si ce n’est peut-être pour amortir une éventuelle chute du au bond. Son visage était à quelques millimètres du sien et… Miho était fortement déstabilisée, alternant son regard entre les yeux de son ange gardien et ses lèvres… Très tentant d’un seul coup… son cœur battait la chamade tandis qu’elle déglutissait difficilement, entrouvrant ses lèvres sans pour autant qu’un son n’en sorte.

Elle me remercia une nouvelle fois, et tandis que je me levais, elle suivit le mouvement pour se blottir une dernière fois contre moi. Miho finit par se rassoir gentiment alors que je ne savais pas trop comment nous allions nous occuper. Elle non plus ne savait pas trop, c’était comme je voulais, si ça ne me dérangeais pas.

- Bien sûr que non, tu ne me déranges jamais. D’ailleurs excuse-moi, je viens de me souvenir de quelque chose. Je vais le chercher et je reviens tout de suite.


D’un pas assuré je rejoignais ma chambre rapidement et ouvrais la penderie. Malgré ce que je lui avais promis la dernière fois : qu’on irait lui racheter ensemble une tunique, je n’avais pas résisté à l’envie de lui faire une petite surprise et de lui acheter.

Bon j’avoue que la vendeuse m’avait un peu aidé, j’avais eu peur de faire un faux pas vestimentaire. La mode ce n’était pas vraiment mon truc et même si je voyais des jeunes tout les jours à la fac, les styles étaient tellement variés et différents. J’avais tout de même essayé de choisir quelque chose qui correspondrait à Miho.

Le vêtement était bien emballé dans un paquet rouge flamboyant et un petit nœud blanc. Je l’attrapais délicatement. Pensif, je me demandais si l’occasion était bien choisie pour lui offrir ce présent. Bon de toute façon il n’y a pas de moment pour donner un cadeau.

Décidé, je me dirigeais dans mon salon pour découvrir…Miho somnolente sur le canapé. Elle devait être vraiment fatiguée après toutes les émotions de la journée.

Sans faire de bruit je posais mon paquet sur la table basse, je débarrassais le plateau avec le thé et nos tasses et j’allais les ranger sur mon bar. Je prenais un petit plaid dans un tiroir près de mes étagères. Nous étions au mois de février, et même si mon appartement était bien chauffé, je trouvais que Miho n’était pas assez couverte. Le regard attendrissant, je me penchais pour lui mettre le plaid.

Mais je fus coupé dans mon élan par la petite poupée qui se releva assez brusquement, les pommettes légèrement rosées. Je pouvais détailler facilement son visage puisqu’à ce moment là, je me retrouvais le visage à quelques centimètres du sien. Je déglutis bruyamment. Le plaid toujours dans mes mains.

Elle était vraiment mignonne comme ça, toute endormie. Mon réflexe aurait du être de m’éloigner, pourtant je ne bougeais pas d’un pouce. Même quand elle me demanda ce qu’on faisait et qu’elle se frotta les yeux pour finir par les ouvrir. Elle fit un bond. Logique vu notre proximité.

Pourtant je restais comme figé. Mon regard ne se lassait pas de détailler le moindre recoin de son visage poupin. Je ne m’apercevais pas vraiment que cela pouvait être perturbant pour la petite nippone. Soudain je croisais son visage et haussais un sourcil, perplexe. Pourquoi le regard de Miho alternait entre mes yeux et ..Mes lèvres ?

Après tout ce qu’il s’était passé entre nous, je n’arrivais toujours pas à comprendre. Enfin, une part de moi refusait de comprendre. Je décidais de tourner ça en dérision. En espérant qu’elle ne le prenne pas mal.

- Miho…Arrête ça s’il te plait. J’ai l’impression que tu vas me manger tout cru là.

J’éclatais de rire. Ouais c’était mon dernier truc trouvé pour esquiver, raconter des trucs minables.

- Pardonne-moi. C’était vraiment nul. Et pas drôle.

J’esquissais un faible sourire. Non mais je me serais taper la tête contre le meuble si elle n’avait pas été là. Pourquoi je faisais des trucs aussi bêtes en sa présence ? Franchement je passais pour le dernier des idiots. Je faisais une petite moue et je jetais le plaid sur le canapé pour m’emparer du paquet sur la table.

- Tiens..c’est pour toi. C’est dix fois rien. .

Je lui mettais le cadeau dans les mains.

- Si ça ne te plaît pas ou ..que ce n’est pas ta taille. On pourra le ramener au magasin.
Un petit sourire timide sur les lèvres, j’attendais, impatient, sa réaction.

Spoiler:

Pendant son absence, Miho en profita pour piquer un petit somme, s’endormant presque. Mais quelques bruits la ramenèrent ainsi qu’un doux rêve assez étrange, le fait que Kanon y soit l’avait perturbée. La petite poupée se releva, très proche du jeune homme, alternant entre ses yeux et sa bouche. Malheureusement pour elle, le jeune homme le remarqua et ne faisant rien, elle crut d’abord qu’il ne voulait pas d’elle. Elle se refusait de toute façon à lui faire du tort. Il fit, une certaine remarque qui la rassura, mais en un autre sens l’avait complètement fait, paniquer, le cœur battant, ses joues rouge cramoisi, elle se mordit la lèvre, n’osant pas répondre.

Le serveur s’éclata de rire, faisant un peu sursauter la demoiselle qui n’apprécia pas d’ailleurs, mais le fait qu’il soit si innocent lui plaisait bien, il ne risquait absolument pas de lui faire du mal, bien au contraire et le voyant faire la moue, elle voulut répondre, mais fut coupée par un petit paquet très mignon posé sur ses genoux. Son regard s’illumina alors qu’elle l’ouvrait délicatement, tenant à conserver l’emballage, une chose stupide qu’elle fait depuis qu’elle est toute petite, un peu comme le souvenir d’un très bon moment. La Nippone regarda alors la tunique, souriant, puis elle déposa instinctivement un baiser sur la joue de l’ange, trottinant jusque dans la chambre en se rendant compte de son geste, tout en criant :

« Je… je vais l’essayer merci ! Elle est superbe ! »

Une fois seule, elle s’éventa d’une de ses mains, soufflant un bon coup avant d’enfiler le vêtement. Elle se regarda dans un miroir, ne comprenant pas ce qu’il y avait de spécial en elle qui avait tant plu à Kanon et par la même occasion, ne pensant absolument pas lui plaire alors que quoi qu’il puisse faire, aux yeux de la petite poupée il était toujours parfait. Elle retourna donc dans le salon, se mordillant la lèvre, elle priait en réalisant que le vêtement était trop court, du moins pour la tenue qu’elle avait mise et se promis de mettre des collants la prochaine fois qu’elle sortait avec Kanon.

Tout ce qu’elle espérait à présent, c’est qu’il n’ait aucune vue sur sa petite culotte… le fait qu’elle aille s’assoir par ailleurs pouvait être fatal. Elle se racla la gorge, s’étant montrée en ayant fait un petit tour sur elle-même pour lui montrer, ayant pris grand soin de tirer au préalable la tunique en faisant ensuite le moins de mouvements possible. Une fois fait, toujours aussi rouge, elle fila dans la chambre.

« Je… elle me va très bien enfin… hm… je pense, non ? »

Elle s’habilla de nouveau convenablement, ou presque… disons que le blanc était facilement transparent… heureusement pour elle, ce n’était pas le cas. Enfin, cela dit, elle retourna près du jeune homme pour s’asseoir à côté de lui. Elle vit au passage le plaid et lui sourit, se maudissant d’avoir osé l’embrassé sur la joue, bien qu’elle aurait voulu plus, mais persistait à ne pas vouloir cette image dans sa tête.

« Je… hm… me sens beaucoup mieux… »

Souriante, la demoiselle posa sa tête sur l’épaule de son ange, n’osant pas lui prendre la main. Elle ferma les yeux, se demandant ce qu’il serait advenu d’eux s’ils s’étaient croisés à son époque… s’ils avaient été du même temps et tous deux de leurs vivants… puis elle soupira, relevant sa bouille.

« Dis… est-ce que…. Tu es sur ? Je ne t’embête vraiment pas hein ? »

Ce n’était pas une question, en réalité, elle avait très peur et ne voulant pas bouger elle ne voulait pas s’imposer cette nuit, d’autant plus qu’elle se releva immédiatement clignant plusieurs fois des yeux, complètement choqués.

« Miiiiince ! Je devais dormir chez ma mère… elle… a dû partir en pensant que je retournais à l’internat… sauf que j’ai prévenu l’école que je dormais chez moi… »

Quel micmac ! Pauvre petite chose, elle avait dépassé le couvre-feu et voila qu’elle se retrouvait à la rue ! Généralement il n’y avait personne chez elle, raisonne pour laquelle elle dormait à l’internat ou dans l’immense appartement. Sauf qu’elle n’avait pas récupéré les clés de chez elle… restées à l’internat… elle n’avait vraiment pas de chance, puis se rendant compte qu’elle venait de dire ça à Kanon, elle se mordit la lèvre, arborant une bouille des plus tristes.

« Pardon… je… hmf… j’irais dormir à l’hôtel, je pense que ça vaut mieux… »

Miho retenait toujours la leçon… ou presque et se souvenant de la seule et unique fois où ils avaient dormis dans la même pièce, elle se sentit mal, pensant également qu’elle aurait pu partager ce moment si anodin avec sa sœur si elle ne craignait pas que celle-ci la rejette. Elle déglutit difficilement, soupirant pour la énième fois.

« Avant que je parte… hm… non, je ne veux pas abuser… pardon, je suis malpolie »

Une petite courbette et la demoiselle n’osa plus lever les yeux vers son protecteur, honteuse, ne sachant absolument pas comment réagir, du fait qu’elle soit chez lui, qu’il l’ait à plusieurs reprises vues pleurer, qu’il soit la pour elle si gentille alors qu’elle ne pouvait rien pour lui… mais encore qu’elle s’était mal comporté avec lui lorsqu’ils étaient dans sa chambre et à plusieurs reprises l’ayant mis dans l’embarras, notamment ce soir où elle avait presque l’impression d’avoir fait exprès de penser tout haut pour son problème de logement.

« Je suis vraiment désolé, je ferais mieux d’y aller… »

Se relevant doucement, elle n’osait plus le regarder dans les yeux, lui, qu’elle aimait tant et à qui elle avait causé tant de souci et d’inquiétude. Lui, qu’elle chérissait plus que n’importe quel être et qui, bien qu’elle se refusait de l’admettre avait obtenue une partie conséquente de son pauvre petit cœur meurtri… lui à qui elle n’osait pas avouer ses sentiments de peur qu’il ne comprenne pas ou qu’il ne sache que faire… lui, tout simplement… pour qui elle avait l’impression d’être un poids constant à sa cheville…

Le paquet sur les genoux, Miho l’ouvra délicatement sans déchirer l’emballage. Chose que je n’aurais pas hésité à faire à sa place. Visiblement la tenue lui plaisait puisqu’en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, elle avait déposé un bisou sur ma joue et elle s’était levée pour se diriger vers ma chambre en me signalant qu’elle allait l’essayer.

Bon ben ok. De toute façon, surpris par sa vivacité, je n’eus pas le temps de trouver une réplique adéquate et je n’avais pas envie de me ridiculiser une fois de plus.

La petite poupée réapparut enfin alors que je daignais poser mes fesses sur le canapé. Sur le coup elle était beaucoup moins enthousiaste qu’il y avait quelques secondes, mais je remarquais bien vite que c’était surement du à la tunique qui était…Ma foi, qui était très courte quand même.

Se mordant la lèvre, Miho fit un petit tour sur elle-même. En retournant se changer, je ne vis pas que la jeune fille était rouge, sinon j’aurais modéré mes propos. En effet, de ma chambre, pas très sure d’elle, je l’entendis me dire que ça lui allait et me demandais ce que j’en pensais.

Même si moi aussi je n’étais pas très à l’aise, j’estimais en avoir vu un peu plus qu’habituellement. Heureusement que j’avais déjà vu des filles court vêtue dans la rue, sinon j’aurais eu un arrêt cardiaque. Enfin ce n’était pas n’importe quelle fille dans la rue, c’était Miho. Et elle me faisait toujours cette effet là : c’est comme ci j’avais un nœud de cravate trop serré ou une fourrure en laine sur le dos. Expirant à fond, je tentais de me reprendre.

- Ça te va très bien Miho. C’est même…très…comment vous dites déjà…cette expression anglaise. Ah oui ! C’est « sexy » !

Heuu…Je me demandais si ce terme était bien approprié tout à coup. Peut être pas non. Les jeunes d’aujourd‘hui utilisent toute sorte de termes et d’expressions étrangères dont je ne comprenais pas toujours le sens. Bref je décidais de passer outre lorsque Miho revint dans la pièce, rhabillée.

Elle s’assit à coté de moi, posant automatiquement sa tête sur mon épaule et me rassura en m’avouant qu’elle allait mieux. Le moment fut de court durée puisqu’elle releva la tête pour me demander une nouvelle fois si elle ne me dérangeais pas. J’haussais les épaules.

- Non je te l’ai déjà dit, tu ne me déranges jamais. Est-ce que tu…

Je fus coupée net par les yeux de Miho qui s’agrandissaient au fur et à mesure qu’elle prenait conscience d’un truc qu’elle n’allait surement pas tarder à me faire partager.

En effet elle m’annonça, qu’elle avait prévenue qu’elle ne dormirait pas à l’internat..mais qu’elle n’avait pas prévenue sa mère bref je comprenais rapidement qu’elle n’avait nulle part où aller ce soir. Je voulus répondre mais Miho ne m’en laissa pas le temps. Elle s’excusa et m’annonça qu’elle allait dormir à l’hôtel.

Même si le flux de pensées dans ma tête devint très intense, la première chose qui s’imposait à moi était qu’il n’était pas question qu’elle aille dormir à l’hôtel. L’hôtel c’est …beurk. J’en frémissais rien que d’y penser.

Pourtant la solution s’imposa à moi comme une évidence. Miho commença une phrase pour s’arrêter net et me demander pardon une énième fois. Je me maudissais de ne pas savoir être réactif dans ce genre de situation. Il fallait que je prenne les devants. Elle se leva et me fit une petite courbette polie.

Alors qu’elle me disait qu’elle ferait mieux d’y aller, je ne savais pas du tout ce qu’il me prenait mais je me ruais sur ma porte d’entrée. Je me postais devant, les bras croisés et les sourcils froncés.

- Tu penses vraiment que je vais laisser une jeune fille de 17 ans, aller toute seule dormir dans un hôtel. Tu n’es pas sérieuse là j’espère ?

Je l’attrapais doucement par les épaules et la regardais droit dans les yeux. Bien sur que je savais qu’il existait dix mille solutions plus faciles, qu’il n’était pas encore si tard et qu’on aurait pu essayer de la faire rentrer dans l’internat. Avec l’aide d’un adulte, ça aurait surement marché. Pourtant je ne pensais qu’une seule chose à ce moment. Qu’elle reste près de moi.

En plus, je craignais qu’en se retrouvant seule, elle recommence à s’angoisser. Elle n’était pas en état et moi non plus.

- Tu sais bien que tu n’es pas de taille à lutter contre moi. Et quoi que tu dises, c’est décidé, tu restes.

Un petit sourire satisfait, je restais planté devant ma porte comme un de ces gardes fidèle à son poste. Les bras croisés. Il n’était pas question qu’elle mette un pied dehors. Même si j’ignorais comment nous allions faire puisqu’il ya quelques semaines, j’avais cassé mon clic-clac ce qui voulait dire que nous n’avions qu’un lit pour deux. J’évitais de penser à ça.

Au contraire, je prenais un air décontracté, un sourire en coin, les yeux doux. Je savais que personne ne pouvait résister à ça. En y réfléchissant bien c’était la première fois que j’usais de mes « charmes » pour Miho. Je m’étais comporté toujours de façon naturelle avec elle. Cette fois ci, elle avait en face, le jeune serviteur prêt à vous faire consommer n’importe quelle boisson pour ses beaux yeux.

- Miho…s’il te plait. J’ai même prévu un repas italien ce soir, je suis sur que tu aimes ça. De bons spaghettis avec une sauce à la tomate.

Docilement, je la prenais par la main et l’emmener s’assoir sur une chaise au bar. Comme ça je pourrais cuisiner tout en discutant.

Pauvre demoiselle qui se mit à rosir lorsque son ange affirma que ça lui allait, elle revint au moment ou il prononça le mot « sexy », son cœur rata un battement, est-ce qu’il avait la moindre idée de ce que ça voulait dire ? La petite poupée vint s’asseoir contre l’ange, puis se redressa bien vite en se rendant compte de son oublie. Tout se passa très rapidement après cet évènement. En effet, Miho voulut partir sans quémander son reste, mais Kanon l’en empêcha, presque aussitôt il s’était retrouvé devant la porte, bras croisés ce qui avait fait sourire la demoiselle, bien que surprise par ce mouvement. Elle le laissa poser ses mains sur ses épaules, penchant la tête sur le côté.

« Mais… Kanon… je ne veux pas que tu te sentes obligé… allé… pousse-toi, hein ? »

Lutter contre lui ? Elle n’avait même pas pensé à cela, sachant pertinemment qu’elle n’avait pas la moindre chance et il le lui rappelait qui plus est. La Nippone soupira, le regardant l’air de dire « tu veux vraiment jouer à ça ? » attendant donc. Son paquet qu’elle avait soigneusement rangé dans son sac et réemballé d’ailleurs étant resté sur le canapé, elle se retourna pour aller le récupérer, puis voyant qu’il lui faisait les yeux doux, arqua un sourcil.

« Ça… ça ne prend pas avec moi… garde ça pour une minette plus bête… »

Elle lui tira la langue, souriant quand même, se résolvant à poser ses affaires une nouvelle fois pour suivre Kanon et s’asseoir en fasse de lui. Il l’avait tenté avec son repas… voila que son petit ventre d’affamée prenait le dessus et grondait au plus grand malheur de notre demoiselle.

« Si j’ai faim…, c’est de ta faute… au fait, tu voulais me dire quoi tout à l’heure ? »

Bizarrement le voir faire la cuisine lui donna envie de l’aider, il se débrouillait bien, mais quand c’était à deux, c’était mieux non ? Préparé avec amour ~ rien de plus adorable. Elle descendit donc du tabouret, enleva ses chaussures pour marcher en chaussette, mais pas de chance, le serveur l’avait pourtant prévenu que ça glissait ! Elle se rattrapa au jeune homme, fermant les yeux dans le cas d’une éventuelle chute, mais rien ne se produisit. Elle ouvrit un œil, puis l’autre et se redressa, se raclant la gorge pour changer de sujet.

« hm… je ne doute pas de tes compétences, tu as l’air de pas mal t’en sortir, mais… je voudrais t’aider »

Oui, elle avait légèrement peur qu’il ne veuille pas, mais surtout elle n’appréciait pas de s’incruster de la sorte. Début de soirée, ou presque et ils étaient là, en train de préparer le repas après avoir longuement discuté. Phileas les regardait et… fit le mort sous l’œil complice de la lycéenne. Elle tapa sur le bocal, clignant plusieurs fois ses mirettes.

« K…Kanon ! Phileas a un problème ! »

Le poisson était parfait, complètement dans son rôle avant de finalement se remettre comme il faut et faire deux tours de bocal pour que son propriétaire ne fasse pas de crise cardiaque. Miho mit sa main devant sa bouche, s’empêchant de rire et ainsi de montrer qu’elle était complice. Puis elle commença à mettre les pates dans l’eau bouillante. Elle regarda le jeune homme faire sa sauce, se mettant sur la pointe des pieds pour se pencher sur son épaule, souriant. C’est fou, avec lui elle oubliait tous ses soucis et cette boule au ventre qui la faisait souffrir était toujours présente, certes, mais faisait l’effet d’une crampe.

« Encore du sel… non, pas autant ! Attention le basilic… ça sent vraiment bon… »

Tout ce qu’elle voulait, s’était l’embêter un peu, mais surtout lui montrait qu’elle revenait petit à petit et qu’elle allait plus ou moins bien, une fois qu’elle sera seule sur le canapé, elle se morfondra, elle aura tout le temps nécessaire pour ça, mais ne voulait plus penser à ses problèmes pour le temps qu’elle passait avec son protecteur, ne serait-ce que par respect et même si c’était son rôle de l’aider à aller au mieux, elle ne voulait pas que lui aussi soit dans un état second.

« Tu sais, on dit que les plats italiens sont les plus romantiques… »

Se rendant compte de ses paroles, elle se décolla du jeune homme, se raclant la gorge, le rouge aux joues et pour ne pas mettre la puce à l’oreille de ce dernier, elle agita un peu sa main comme si elle avait chaud… bien sûr, il va surement la croire étant donné qu’elle est habillée très léger aujourd’hui… vraiment elle faisait tout de travers aujourd’hui, c’est à croire qu’elle avait de plus en plus de mal à se tenir en la présence du jeune homme.

« Où tu caches tes couverts que je puisse dresser la table ? »

Changement de sujet, notre miss était une pro ! Vraie petite diablesse pour la peine, même si tout le monde trépigne d’impatience de voir ces deux-là main dans la main, encore que Miho en rêvait aussi, ce n’était pas le moment propice quoique… elle secoua la tête, aidant le jeune homme, écarquillant ses yeux en voyant que la lumière avait grillée. Cachée contre un mur à cause de la petite étincelle, elle alla se blottir dans les bras de l’ange.

« hm… je crois que tu n’as pas de lumière dans ton salon…cuisine… »

Ils n’avaient pas eu jusque-là à allumer la lumière, mais apparemment n’en auront pas l’occasion. Plusieurs solutions s’offraient à présent à eux : diner aux chandelles ou à la lueur des étoiles ? Si l’ont voulait éviter le massacre au couteau à beurre avec Miho… il était préférable de choisir la première option, ce qui les mettait d’autant plus dans l’embarras, surtout la demoiselle qui, bien qu’innocente était beaucoup plus au courant que Kanon, aussi bien sûr ses sentiments que la signification de tout ceci.

Comme je m’y attendais, Miho ne céda pas facilement, me demandant d’abord de me pousser de la porte, je lui rappelais qu’elle n’était pas de taille à lutter contre moi. Je tentais aussi ma formule spéciale « cliente difficile » qui marchait du tonnerre de feu au boulot. Mais visiblement pas sur Miho qui me dit de garder ça pour une minette plus bête.

Déçu, je ne me bougeais pas pour autant. Je remportais tout de même la partie en lui proposant un alléchant repas italien. La prenant par la main, je l’installais sur un tabouret, en face du plan de travail, et commençais à préparer le repas.

Je n’étais pas spécialement un bon cuisinier mais je savais gérer et faire des trucs quand même mangeables. Et je ne prenais pas trop de risques en proposant des pâtes. C’était un plat super simple à préparer. En s’asseyant, Miho me demanda ce que j’avais voulu dire quelques instants auparavant. Je relevais la tête. Tout en coupant les tomates avec dextérité, je tentais de me souvenir de ce que j’avais voulu dire.

- Ah oui..je voulais te demander, quel genre de film tu aimais regarder.

J’avais une impressionnante collection de DVD mais, ces derniers temps je me lassais un peu des films fantastiques, et j’aurais aimé savoir ce que les jeunes comme Miho aimaient comme films.

Elle se leva, en enlevant ses chaussures. En la voyant faire, j’anticipais déjà une chute. Je l’avais prévenu. Cela ne tarda pas à arriver. Heureusement qu’elle était assez près de moi pour que je puisse la rattraper. Je n’ eu pas le temps de faire grand-chose puisqu’elle se rattrapa à moi en fermant les yeux. Ma main vint se placer sur ses omoplates, et quand je m’assurais qu’elle reprenait son équilibre, je la lâchais.

Elle ne doutait pas de mes compétences mais elle voulait me donner un coup de main. Ben voyons, comme ci j’allais laisser une invitée faire la popote. Je la regardais l’air embêté. Il n’en été pas question. Mon front se plissait.

- Miho, tu ferais mieux de remettre tes chaussures au lieu de penser à m’aider. Je me débrouille très bien, ne t’en fais pas.

Je n’avais pas gardé mes habitudes de gentleman pour rien. J’étais en train de sortir une poêle pour commencer à faire mijoter la sauce quand ma petite protégée m’interpella.

Ma réaction ne se fit pas attendre. Je lâchais tout ce que j’avais dans les mains. C'est-à-dire la poêle, heureusement encore vide, qui tomba avec fracas sur le parquet. Je me relevais et avançais rapidement pour voir Phileas, couché sur le ventre. Miho tapait sur le bocal sans aucune réaction.

Une goutte de sueur sur la tempe, (surement du à la chaleur de la gazinière), je me tournais vers Miho, inquiet.

- Mais qu’est ce qu’il a ?

Pas besoin de réponse, puisque le petit poisson sembla se réveiller et fit deux tours rapides du bocal. Je ne suis pas un devin mais je m’apercevais qu’ils m’avaient joué un tour. Qui donc ? Miho & mon poisson.

Ah beh de mieux en mieux. Je faisais semblant d’être vexé. Je retournais dans la cuisine pour ramasser la poêle. Mais le temps de reposer l’instrument sur le gaz, j’étais redevenu souriant.

Je ne savais vraiment pas jouer la comédie. D’ailleurs je ne m’étais même pas aperçu que Miho en avait profité pour mettre les pâtes dans l’eau que j’avais mis à bouillir quelques instants auparavant. Je réprimais une très forte envie de la soulever et de la réinstaller sur le tabouret.

Mais ce ne serait pas trop convenable. Je me mordais la joue. Elle se pencha et commença à faire des commentaires sur ce que je mettais dans ma sauce. Légèrement exaspéré, je lui tendais une cuillère.

- Tu doutes vraiment de mes capacités alors goute par toi-même !

Bon, si c’était un excès de confiance et que ma sauce s’avérait désastreuse, j’étais mal. Donc j’attendais patiemment qu’elle prenne une cuillerée et qu’elle me dise ce qu’elle en pense avant de rajouter quoique ce soit. Elle me rappela que les plats italiens étaient les plus romantiques.

Cette fois ci je ne pus réprimais un petit soupir mi-amusé mi-gêné. Sans rien répliquer, je continuais à m’appliquer à ma sauce avec concentration. Elle se pencha pour me demander ou se trouver mes couverts. La fois de trop. J’éteignais le feu, me lavais rapidement les mains, et m’approchais d’elle, tentant de prendre un air menaçant.

- Miho…

Je n’eu pas le temps de continuer ma phrase puisque le système électrique décida de faire une nouvelle fois des siennes et mon ampoule grilla avec quelques étincelles.

La réaction de Miho ne se fit pas attendre, elle se plaqua contre un mur. De mon coté je parcourais les quelques pas qui nous séparais. Elle vint se blottir contre mon torse. Sans oublier de me faire remarquer qu’il n’y avait plus de lumière.

J’étais très à l’aise avec l’obscurité, capable de me déplacer dans mon appart sans toucher un meuble. Mais je savais que ce n’était pas le cas de Miho. Nous étions en hiver et la nuit était tombée très vite. Je lui tapotais le bout du nez, décidé à me venger un peu du tour qu’elle m’avait joué avec mon poisson.

- Tu vois ce qu’il arrive quand une invitée en fait un peu trop ? T’a fais griller mon ampoule !

Bien entendu je n’étais pas sérieux. Mais dans le noir elle ne pouvait pas voir mon large sourire. Délicatement, je frottais mon pied contre le parquet pour émettre un faible mais angoissant, grincement.

- Quand la lumière est éteinte, on peut parfois entendre le bruit de fantômes. C’est ce qui rend cet endroit si charmant. Tu les entends ?

Je recommençais mon manège, une fois de plus, pour m’arrêter net. Je n’avais pas envie qu’elle me déteste à cause de ça. Je réprimais un rire.

- Ah je suis vraiment terrible quand je m’y met...et avoue que toi aussi.
- Ne bouge pas !

Très délicatement ; je soulevais la petite poupée comme ci elle était en porcelaine. Un bras sous ses genoux et un derrière son dos, je me déplaçais dans la pénombre de mon appart, sans rien frôler. Enfin arrivés à destination, je la déposais sur le canapé.

- Je vais chercher des bougies, ne bouge pas hein ?

Je repartais dans ma cuisine et fouillais mes tiroirs à tâtons pour enfin trouver un paquet de bougies chauffe-plats. Parfait. Une à une, je les allumais avec le feu du gaz. Je les déposais sur une assiette et la rapportais dans le salon, la posant sur ma table basse. Diffusant ainsi un peu de lumière.

J’allumais aussi la TV et baissais le son à fond. Je me retournais enfin vers Miho.

- Voilà…N’est pas peur hein ? Je vais finir de préparer les spaghettis et je les apporte ici le plus rapidement possible. En attendant..tu peux choisir un film a regarder pour après.

J’ouvrais le meuble sous la TV pour qu’elle puisses choisir.

Finalement, ils avaient trouvé un accord, mais Kanon ne semblait pas vouloir la laisser l’aider. Il voulait lui demander quel genre de film elle préféré et la nippone ne répondit pas, ne serait-ce que pour l’embêter une nouvelle fois. Mais voilà, à force de l’embêter, elle allait véritablement l’énerver. Premièrement, elle tomba et se rattrapa au serveur, puis elle se remit de ses émotions, rajoutant quelques petits commentaires pour passer outre sa faute. Elle lui tira même la langue lorsqu’il lui demanda d’aller s’asseoir. Il était sur le point de lui répondre quand la poêle tomba et le poisson se retourna, à voir son air complètement paniqué, Miho aurait voulu le prendre dans ses bras, mais elle rit légèrement, avant de s’inquiéter de le voir bouder. Mais ça ne dura pas longtemps, heureusement. Pour la peine, elle le regarda faire, n’ayant rien d’autre à son programme de la soirée. Il lui fit gouter la sauce qui avait vraiment très bon goût ! Elle en était bouche bée ! La demoiselle les yeux écarquillés cligna plusieurs fois ses mirettes pour en faire par à son ange.

« Mais tu sais très bien la faire cette sauce ! Comment t’as réussi à faire ça ? »

Peut-être un ingrédient secret ? Quoi qu’il en soit, elle se mordit la lèvre, avant de reprendre la parole, c’était décidément plus fort qu’elle ! Puis elle le vit s’avancer vers elle, l’air plus ou moins menaçant alors qu’elle souriait, embarrassée. À ce moment précis, elle qui voulait allumer la lumière vit une petite étincelle, la faisant fuir. Puis la remarque du jeune homme qu’elle prit pour elle malgré ce sourire qu’il affichait et qu’elle ne voyait pas. Elle baissa la tête, se sentant coupable de tout ce qui pouvait se produire en la compagnie du jeune homme et surtout, de tout ce qui était mauvais dans sa vie à partir de leur rencontre.

« Je suis désolé… tu vois je t’avais dit que j’aurais du aller à l’hôtel… »

Bien entendu elle n’était pas sur le point de pleurer, mais un petit pincement au cœur la pris, d’autant plus quand il se mit à faire ces grincements et qu’elle n’en sut pas l’origine bien évidemment, elle le chercha avant de s’agripper à son pull, se blottissant contre lui, paniquée. Puis quand elle l’entendit rire, lui foutu un petit coup de pied dans la jambe, juste pour lui signaler qu’il lui avait fait peur. Mais elle ne dit rien par rapport à cette gêne dont elle se sentait responsable.

« En plus… si tu te mets à me faire peur… et que je ne dors pas, ce sera de ta faute… et si j’ai peur je vais venir t’embêter pendant la nuit… tu n’auras qu’à t’en prendre qu’à toi-même ! »

À charge de revanche, n’est-ce pas ? Elle le laissa la porter, surprise, s’agrippant à lui, c’est bien connu, la demoiselle n’aime décidément pas la hauteur, d’autant plus que Kanon n’était pas un modèle standard, évidemment il était grand et fort et il avait du manger beaucoup de soupe lorsqu’il était petit, pas comme notre casse-pied nationale ! Elle se laissa faire, il connaissait mieux son appartement à vrai dire, c’est ce qui était rassurant, puis le fait étant qu’elle était dans ses bras, quoi de mieux pour la rassurer ? La lycéenne finit par atterrir sur le canapé, laissant faire son protecteur qui revint quelques secondes plus tard pour mettre des bougies sur la table. Elle se pencha sur la télévision, regardant la collection de DVD en hochant la tête lorsqu’il lui proposa de choisir.

« T’en a beaucoup… tu les as tous vus ? C’est… impressionnant ! »

Souriant, la demoiselle posa ses yeux sur les films fantastiques, visiblement Kanon avait l’air d’apprécier les visions qu’avaient les hommes sur les cieux et les enfers ! En même temps, c’est vrai qu’il ne venait pas de la même époque et la plus belle histoire à raconter était pour Miho la sienne, fasciné par son ange gardien, sous toutes les coutures possible !

« hm… je ne sais pas vraiment quoi regarder, à vrai dire, si tu as quelque chose qui pourrait nous détendre et qui est à la fois passionnant, pas trop glauque, pas trop romantique ? »

Une description des plus précise qui pouvait surement donner du mal au jeune homme dans sa recherche du film parfait. Miho se releva doucement, allant se rasseoir, un peu mal à l’aise en voyant les bougies. Elle était tentée de s’excuser, regardant son ange avec des yeux de chien battu… histoire de lui transmettre un peu son malaise, elle pensait vraiment que tout était de sa faute.

« hm… j’ai… j’ai hâte de goûter ! ça doit être délicieux ! »

Compliment qu’il méritait sans aucun doute, puisque les plats étaient joliment décorés et qu’une odeur agréable s’en dégageait, une légère fumée venant chatouiller les sens de notre demoiselle ainsi que de chatoyantes couleurs qui lui faisaient envie. C’est sur cette pensée qu’elle finit par relever le visage pour voir la réaction du jeune homme. Ils étaient deux, ils allaient partager un repas romantique, le tout éclairé aux chandelles, lumière tamisée qui rendait l’atmosphère lourde de sous-entendus. La demoiselle aurait tout donné pour un seul regard, pour une caresse… pour bien plus, son âme même, était troublée.

N’osant pas commencer elle se contenta de se mordre la lèvre, pensant à ce que pourrait être la suite de cette soirée, qu’allait-il se passé lorsqu’ils se retrouveraient sur le canapé à regarder un bon film, côte à côte ? Pourrait-elle résister à sentir son souffle contre le sien, à frôler une nouvelle fois sa joue, voir même ses lèvres ? Elle en eut des frissons, soudainement rouges. Mais voilà, elle était partagée à l’idée de pouvoir corrompre son ange gardien pour son bon plaisir. Plaisir ? Non, pour les besoins qu’avait son cœur de lui appartenir, d’être prêt de lui constamment ou de sentir sa présence rassurante. La nipponne avait beau vouloir étouffer ses sentiments, elle ne pouvait lutter contre eux quoi qu’elle dise, qu’elle fasse.

En était-il de même pour le jeune homme ? Évidemment, elle voyait bien qu’il ne comprenait pas et là était peut-être son avantage, lui il n’était pas torturé et également, il n’avait pas besoin de se poser toutes ces questions, était-ce bien ? Mal ? Est-ce qu’elle devait jouer la carte de la franchise comme elle lui avait promis de toujours le faire, au risque même de le troubler lui aussi et de se retrouver conférée à un autre ange gardien ? Non, elle ne voulait personne d’autre que lui et les phrases qu’elle avait prononcées lorsqu’il avait été blessé n’avaient pas été prononcés à la légère, s’il mourait c’était également la fin de sa vie, du moins, son cœur serait en lambeau… il était important, plus que tout…

Se souvenant de sa blessure, elle se promit de vérifier qu’il n’avait plus rien ou avait pris soin de se désinfecter au moins. Mais cela devait attendre le temps qu’ils finissent. D’ailleurs, de fil en aiguille, elle se promit de faire la vaisselle, bien qu’il refuse surement. Elle n’insisterait pas trop cette fois-ci, au risque de provoquer une nouvelle catastrophe qui serait la goutte d’eau faisant déborder le vase.

Finalement, elle porta ses baguettes à sa bouche et sourit en pensant à la façon occidentale de manger ces mets. Ils avaient des fourchettes et c’était bien dommage de ne pas pouvoir tester, mais elle ne s’en plaignait pas le gout y était, succulent ! Ni trop chaud, ni trop fois, la sauce étant parfaite, cela méritait clairement qu’elle lui foute la paix quelques instants, bien qu’elle ait surement dû zapper quelques paroles du jeune homme, trop occupée à contempler son plat ou par la faute de son absence due à ses réflexions précédentes. Quoi qu’il en soit, elle dégusta avec bonheur ce bon petit plat, observant Kanon avec une terrible envie de se pencher pour jouer à la belle et au clochard… bien qu’il n’ait à proprement parlé rien du clochard, ici, elle avait l’impression que les rôles s’inversaient.

« C’est vraiment délicieux… hm… »

Elle n’osa pas faire part de sa pensée au jeune homme et il devait se douter que son cerveau travaillait dur depuis tout à l’heure, puisque la pipelette n’avait pas beaucoup parlé pour… une pipelette. Mais ne lui en voulons pas, si elle devait le faire elle aurait mis l’ange dans l’embarras et elle-même par la même occasion, il y a des choses qui doivent rester secret et la curiosité est un bien vilain défaut dans ces cas là, bien que n’importe qui, n’importe quelle créature, homme, anges, démons soit tiraillé par cette vilaine bébête.

Au moment où Miho m’annonça que si elle avait peur elle allait venir m’embêter dans la nuit, je laissais échapper un petit rire nerveux. Ouais …il allait bien falloir que je lui annonce que je n’avais qu’un seul lit. Mais, désireux de ne pas trop y penser, je décidais de repousser cela à plus tard. Je veux dire, la dernière fois, dans sa chambre, on avait dormi très prés l’un de l’autre. Ce ne serait pas si différent avec mon lit King-size, si ?

Bon j’essayais de penser à autre chose que ça, tout en la prenant dans mes bras pour la déposer sur mon canapé. Rouge de honte, je lui montrais mes DVD et je partais chercher des bougies pour nous éclairer.

Une fois fait, je repartais de bon train, chercher le repas. Je revenais avec nos assiettes et nos verres. Une sur chaque bras, les verres dans une main, les baguettes et les serviettes dans l’autre, je n’étais pas serveur pour rien quand même !

Je déposais tout sur la table basse quand Miho me demanda quoi regarder comme film. Pas trop glauque, pas trop romantique ? Pour le romantique..pas vraiment de problème pour ça, les films fantastiques ne le sont pas trop en général. Par contre pour le glauque…j’avais quand même beaucoup de films d’horreur parmi ma collection. Parcourant les jaquettes avec une main assurée, j’en tirais plusieurs qui auraient pu correspondre à ses critères.

- Anges et Démons ? J’aime beaucoup le titre…mais le film ne parle pas d’anges ou de démons. Plutôt sur la religion. Même si c’est tout à fait irréaliste, le concept est sympa. Sinon j’ai Eragon …un bon petit film avec des dragons.

Je lui montrais aussi d’autres pochettes de film sans trop commenter. J’aimais ne pas trop parler de films, surtout quand la personne ne les a pas vu.

Enfin, nous nous penchions sur nos assiettes respectives. Le compliment de Miho me toucha plus que je ne le laissais paraître. J’avais vraiment mis tout mon cœur dans ses pauvres pâtes. J’étais aussi un peu déçu…j’aurais bien sortir mes couverts, mais j’avais eu peur de me ridiculiser. La vérité c’est que je ne savais pas manger avec une fourchette et un couteau, du moins je n’avais jamais fais d’efforts pour apprendre correctement. Les étrangers devaient surement avoir le même problème avec les baguettes.

Miho mangeait silencieusement. Cela aurait du me réjouir car cela voulait probablement dire que les pâtes étaient bonnes. Mais, de la part de Miho c’était étrange. Habituellement la jeune fille était sans cesse en train de me poser des questions et de me parler. Au début je dois avouer que la chose m’agaçait profondément, mais c’était normal qu’elle veuille en savoir plus après tout.

A présent, son silence m’angoissait légèrement. Je n’étais pas du tout quelqu’un de très bavard. Préférant observer plutôt que de parler. Et Miho était justement en intense réflexion à ce moment là.

Je trouvais ces mimiques impossibles à déchiffrer. Tantôt se mordant la lèvre, puis rougissant. J’aurais aimé me trouver dans sa tête en ce moment là. Ou être capable de mieux lire en elle. Mais je mettais son air absent sur le compte de la révélation qui lui avait été faite quelques heures plus tôt.

Ayant fini mon assiette, je regardais distraitement Miho finir la sienne. Quand soudain je rigolais. Puis me reprenais rapidement, sachant que la petite poupée était aussi susceptible que moi.

- Miho, t’a de la sauce là.

D’un geste, je lui montrais l’endroit exact sur mon visage. Puis, voyant qu’elle n’arrivait pas à se l’enlever, je posais mon pouce sur sa joue pour lui montrer où elle avait de la sauce.

Erreur. Sa peau était douce, et j’étais inexorablement attirée par son visage. Non, par elle tout entière. Mes yeux se perdirent dans les siens et mon cerveau se mit en pause.

Instinctivement, j’approchais mon visage à une distance peu respectable du sien. Mais je me reprenais bien vite, tournant la tête, gêné de ma réaction stupide.

- Mmph..Désolé.

Je me levais, droit comme un « i ». Je me sentais comme le roi des imbéciles. Je savais très bien ce que j’avais failli faire. Est-ce que c’était ce soir que j’allais vraiment comprendre mes sentiments ? Pour l’instant, je continuais à nier en bloc. Je me retournais vers le frigo, n’osant plus regarder Miho dans les yeux.

- Je vais chercher un dessert. J’ai des yaourts au fruit, des fruits et heuu…qu’est ce qui te tente ?

Mmh, question assez inappropriée dans le contexte mais je ne m’apercevais de rien. Me frottant la nuque, j’allais chercher nos desserts. Je revenais et m’asseyais à une distance plus raisonnable que précédemment.

Je ne voulais pas re-provoquer ce qui c’était passer tout à l’heure. Même si je n’avais pas compris, que dans notre cas, ce serait inévitable.

Je mettais le DVD choisi dans le lecteur et enclenchais le bouton lecture. Je me rasseyais, assez confus. Et j’attrapais mon dessert…en même temps que Miho. Nos mains se frôlèrent. Des mains qui s’étaient touchées une bonne centaine de fois depuis notre rencontre. Mais que je continuais à vouloir prendre. Je refrénais cette envie.

Expirant bruyamment, je laissais les images du film défiler sur ma rétine sans vraiment me concentrer. Mon esprit ailleurs. Essayant aussi de me préparer mentalement à annoncer à Miho que nous allions dormir dans le même lit ce soir. A moins que je dorme parterre. Mais oui c’était ça la solution ! Je dormirais parterre, avec deux ou trois couvertures, cela devrait faire l’affaire.

Au fur et à mesure du film, je sentais l’atmosphère entre la petite nippone et moi, se charger en électricité. C’était tendu. Je déglutissais plusieurs fois, comme pour chasser cette tension. Tension dont je ne parvenais pas encore à comprendre. C’était comme ci on m’avait drogué. J’avais de plus en plus du mal à me maitriser. Pas comme ci j’allais me mettre à lui sauter dessus comme un pervers ! Mais juste une envie très forte de la prendre dans mes bras et d’enfouir ma tête dans son cou et de respirer son parfum sucré. Oh il fallait vraiment que je me calme.

Le film se termina et je m’étirais négligemment. Je cherchais à tâtons la lumière. Ah oui c’est vrai qu’elle avait grillée. Me tournant vers Miho, j’essayais d’adopter une attitude beaucoup plus décontracté, sans résultat.

- Tu dois être fatiguée. On va aller dormir non ? J’ai un petit truc à te dire avant … Mais t’a pas intérêt à partir dormir dans un hôtel ou quoique ce soit d’autre hein ? Sinon je te ramène ici, même sur mon dos si il le faut !

Notre midinette ne posa pas beaucoup de question concernant les rougeurs de son ange gardien, qui fila d’ailleurs à toute allure pour aller récupérer plats et serviettes. Pendant que cette dernière regardait les DVD. Il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour se remettre en place et demander directement à son hôte ce qu’il y avait de potable, pas trop romantique. Et son choix fut fait, mettant sa patte sur le DVD d’Eragon. Le repas se passa en silence, ce qui ne semblait plaire à aucun des deux énergumènes, bien que Miho appréciait le plat et se contentait de concentrer toute son attention là-dessus, savourant en essayant de penser le moins possible. Malheureusement, elle fut coupée par un rire assez sonore, la faisant sursauter. Elle plissa les yeux, voyant que son protecteur se moquait d’elle et lui tira la langue.

Mais la poupée rangea bien vite cette dernière lorsque Kanon s’approcha dangereusement d’elle, faisant ainsi rater quelques battements à son pauvre petit cœur torturé. Elle avait subitement chaud. Le jeune homme se redressa, très rapidement d’ailleurs, ce qui fit écarquiller les mirettes de notre adorable Nippone qui se mordit la lèvre à le voir si anxieux. Est-ce qu’à l’instant il avait été tenté de poser ses lèvres sur les siennes ou est-ce qu’elle avait rêvé ? À en conclure par ses paroles et par son attitude, non, elle n’avait pas rêvé. Contente dans un sens, d’avoir la chance que ses sentiments soient partagés, mais dans l’autre d’être un véritable dilemme pour le jeune homme, céder ou ne pas céder ? Un certain Oscar Wilde n’avait-il pas dit que la meilleure façon de résister à la tentation était d’y céder ? Elle secoua franchement sa tête, reportant son attention la question de l’ange.

« hm… un fruit… une pomme, tu as ? »

Qu’est-ce qui la tentait ? Est-ce qu’il l’avait fait exprès ? Elle en doutait, mais autant dire qu’elle ne savait plus trop où ce mettre, Miho tenta néanmoins de garder la tête froide et se mit à côté de l’ange, tenté de se blottir dans ses bras. Elle frissonna, ne voulant absolument pas penser à cela. Mais une question lui trottait dans la tête, elle regarda le film, sans véritablement se plonger dedans. Allait-elle dormir en robe ? C’était très inconfortable, d’autant plus que ses vêtements étaient assez spéciaux, ouverts sur les épaules…, de toute évidence elle n’allait pas trouver le sommeil. D’autre part, elle n’osait pas quémander au jeune homme de lui prêter quoi que ce soit, se sentant déjà de trop.

Kanon posa ses yeux sur la lycéenne, lui demandant si elle était fatiguée, ce à quoi elle hocha très légèrement la tête en guise de réponse, très tentée d’approcher son visage du sien. Mais elle n’en fit rien, luttant très fort contre son désir. Elle le laissa parler, arquant un de ses sourcils, qu’allait-il lui annoncer de si terrible ?

« Tu me dis ou c’est pour demain, hm ? Je ne vais pas te manger… »

Ou presque… elle aussi savait faire quelques sous entendus… sauf que c’était plus ou moins volontaire. La nipponne frissonna une nouvelle fois, se mordant la lèvre en dévisageant le bel homme en face d’elle, doutant ainsi fortement qu’il puisse lui porter autant d’intérêt qu’elle pour lui. Bien trop inapte à lui sauter dessus, elle mourrait d’envie qu’il la prenne dans ses bras, qu’il la fasse frissonner encore en passant sa main dans ses cheveux… mais elle se disait que c’était peut-être mieux de ne pas… franchir le cap ? Bien qu’elle ne se doutait absolument pas de ce qui allait se passer.

Imaginons donc la tête de la pauvre demoiselle lorsqu’elle apprendra qu’elle allait dormir dans le même lit ? Elle serait sans doute, complètement morte de honte et dans ce lit finirait par tomber parterre à moins que son protecteur ne décide de l’entourer de ses bras… Elle n’en pouvait plus… se levant doucement.

« Je… je vais… je reviens ! »

Inutile de dire où est-ce qu’elle se rendait, le jeune homme connaissait son appartement parqueur et pour la peine elle se rendait aux toilettes, non pas pour y faire un quelconque besoin, mais pour s’enfermer quelques minutes, s’étant assise parterre, respirant à fond pour essayer de calmer son pauvre petit cœur et ses bouffées de chaleur. Elle souleva sa frange quelques instants, s’éventant de sa main avant de fermer ses yeux et d’appuyer sa tête contre le mur. Miho était en train d’agoniser à se savoir si proche de l’homme qu’elle aimait et pourtant de ne pouvoir partager quelques moments uniques avec lui seulement dans ses rêves les plus fous. Elle sortit de la petite pièce, allant se laver les mains, puis revint. C’était définitivement sans aucun succès qu’elle avait tenté de s’aérer puisqu’elle en était toujours au même point et pour couronner le tout avait trébuché et atterri sur Kanon… quoi de mieux pour se sentir mourir à petit feu.

« Je… je crois que je vais devoir te dire quelque chose… et… promis je ne filerais pas à l’hôtel… m… mais… tu vas avoir envie de me fuir après et je… je… comprendrais… »

Se mordant la lèvre une énième fois, elle s’assit convenablement sur le canapé, prenant une longue inspiration avant de détourner son regard de l’être qu’elle chérissait le plus. Ne sachant pas comment le lui annoncer, la demoiselle préféra prendre son temps pour tourner de belles phrases, bien qu’une fois certaine de les tenir elle finira par bégayer.

« Je crois que… je… je suis désolé ce n’est pas facile à dire, mais… je… je veux pas t’imposer ça… pardon Kanon… mais je… »

Prise de court par les battements très irréguliers de son cœur, elle murmura simplement un « je t’aime » que le jeune homme pût très certainement lire sur ses lèvres, ou tout simplement entendre, pour peu qu’il portât une attention particulière à ses propos. Mal à l’aise et soudainement très rouge, elle n’osait plus relever son regard, attendant le verdict bien qu’elle était persuadée qu’il n’allait pas lui donner de réponse. Pauvre petite chose… se faire rejeter n’allait pas plus l’aider et pensant que cela pouvait porter à confusion avec les précédents malaises du aux révélations de cette journée, des plus compliquées, elle décida de poursuivre.

« C… je… ça fait un certain moment… que je m’en suis aperçu, mais… je pensais vraiment pouvoir tenir… et… et au final, je n’arrive pas… »

Déçue d’elle-même, mais oh combien soulagée, elle attendait néanmoins le cœur lourd que l’ange lui réponde. Après tout, ces relations étaient interdites, elle s’en voulait que les choses tournent aussi mal en sa présence, surtout avec Kanon et de lui apporter autant d’ennuis. Mais des ennuis… il en aurait seulement si c’était su n’est-ce pas ? Elle ne préférait pas envisager cette solution… bien qu’elle espérait secrètement que ce soit possible, elle était si peu confiante en elle pour ce genre de choses qu’elle se résolvait à croire que tout était fini… que sa vie au côté de l’ange était une catastrophe…

Nous avions fini le repas dans un silence assez étrange. Une fois le film enclenché, le silence avait perduré. Nous étions tout les deux plongés dans nos pensées. Une fois le film fini, je prévenais Miho que je m’apprêtais à lui dire quelque chose qui n’allait pas forcément lui faire plaisir. Miho leva un sourcil et me demanda de lui en dire plus. Je n’aimais pas non plus laissait ce suspens et je prenais mon courage à deux mains, et une bonne respiration.

- Je..Je n’ai qu’un lit pour dormir.

Je n’eu pas le temps de rajouter quoi que ce soit. Le visage de la petite poupée en disait long. Elle se leva doucement. Je me levais en même temps, prêt à la rattraper si elle tentait de fuir. J’ouvrais une nouvelle fois la bouche, mais je vis Miho se diriger vers les toilettes.

Abasourdi, je me rasseyais. Je faisais vraiment tout de travers. J’aurais du commencer ma phrase en lui expliquant que je pouvais dormir parterre et cela ne me dérangeait pas. Là, Miho devait vraiment se sentir mal. Et je pouvais la comprendre. Comment réagir quand son protecteur, âgé de juste quelques années de plus que vous, vous propose indirectement de dormir dans le même lit ? Car c’est ainsi qu’elle avait du comprendre ma phrase. J’ouvrais le lecteur de disque et je replaçais le CD dans sa pochette, machinalement. Je n’avais pas vraiment les idées claires.

J’avais l’impression de confondre tout le temps ce que je voulais et ce que je devais faire. Une chose de sure, je ne voulais pas blesser Miho de quelques façons que soit. Je ne voulais pas refaire la même erreur que la dernière fois et partir quand la situation ne devenait plus évidente pour moi. J’aimais avoir le contrôle sur les choses. Et sentir cette partie de moi, qui m’échappait complètement, me déstabilisais bien plus qu’autre chose.

Miho réapparut enfin et je me levais, désireux de m’expliquer. C’est le moment qu’elle choisit pour trébucher et se rattraper sur moi. J’avoue que je m’étais quand même un peu rapproché pour qu’elle puisse se raccrocher. Je savais qu’elle allait me dire quelque chose. Je posais mes doigts sur ces lèvres pour pouvoir en placer une.

- Avant, je voudrais que tu saches que j’envisage de dormir parterre. Donc il n’y a pas de problèmes hein ?

Puis, je la laissais enfin parler. Visiblement elle ne voulait pas du tout me parler de cette histoire de lit. Mais de quelque chose de plus important visiblement. Elle prenait des précautions. Et cela me rendait encore plus impatient. Pourtant, je l’écoutais patiemment sans l’interrompre. Elle se rassit et je faisais de même. Elle n’était plus sure et se mit à bégayer. Je lui prenais la main. Je savais que quand elle me prenait la main, j’avais l’impression que les choses étaient plus faciles, et j’espérais pouvoir lui donner plus de courage. Elle s’excusa aussi plusieurs fois.

Rougissant, je n’étais plus très sur de moi. D’elle. De ce qu’elle allait dire. Mais il fallait que j’assure. Je prenais un air le plus détaché au possible. Fermant mon visage à toute expression qui aurait pu lui montrer ce à quoi je pensais. Et elle prononça les deux mots. « Je t’aime ».

Oh. Tandis que je gardais mon visage fermé à mes sentiments, mes émotions. Mais à l’intérieur, c’était un véritable feu d’artifice. Mon cœur battait à une allure inhabituelle. J’avais l’impression qu’il tapait sur mes tempes. J’avais chaud. Et je ne savais absolument pas comment réagir. Mais, rapidement, je sus quelle émotion me dominait. C’était du bonheur. Ces deux petits mots murmurés si faiblement me rendaient heureux. Pourtant j’étais aussi pétrifié de peur. Si naïf que j’étais, je savais ce que cela représentait pour nous, les anges. L’amour, ce concentré de tous les péchés humains réunis dans un sentiment.

Je tenais toujours la petite main de Miho dans mes mains. Je fermais les yeux, espérant y voir plus clair. L’amour, était ce donc ce sentiment si étrange qui m’avait habité jusque là ? La réponse devenait de plus en plus claire et tendait vers l’affirmative. Ça expliquait tout. Tout ce qui c’était passé jusqu’à aujourd’hui.

Conscient que je ne pouvais pas faire attendre Miho, je rouvrais les yeux. La petite poupée me signala qu’elle avait comprit depuis un certain moment mais qu’elle n’arrivait plus à garder ça pour elle. J’hochais la tête, compréhensif. Bien sur, je ne lui en voulais pas du tout de m’en avoir fait part. Je préférais savoir. Et cela m’éclairait bien plus sur mes sentiments, qu’elle ne le pensait.

A mon tour de baisser la tête, les pommettes rougies. J’osais enfin briser le silence.

- Miho, je…je ne sais pas si je peux répondre à ça. Si j’en ai le droit.

Deuxième fois dans la soirée. Je la prenais dans les bras. Je ne serrais pas fort, mais je l’emprisonnais avec mes bras puissants pour lui montrer qu’au plus profond de moi, mon cœur lui appartenait à elle et à personne d’autre. Ce que je n’arrivais pas à dire avec des mots, j’espérais qu’elle puisse le comprendre avec ce geste tendre et naïf. Je ne pouvais pas être plus proche d’elle qu’à cet instant. Pourtant mon statut d’ange gardien m’obligeait à garder la distance. Une distance que je ne respectais plus. Miho était plus présente dans mes pensées qu’elle n’aurait du l’être. Elle n’était pas ma protégée, elle était beaucoup plus que ça...et je commençais à le comprendre petit à petit. Enfouissant mon visage dans ses cheveux, j’expirais à fond, essayant tant bien que mal de m’imprégner de son odeur.

- Tu sais que tu comptes énormément pour moi. Pourtant ça ne fait pas si longtemps que nous nous sommes rencontrés. Je sais que tout aurait plus facile si tu ne m’aimais pas.
- Mais ne te méprend pas, ce que tu m’as dit …me touche plus que tu ne le penses.

Mes paroles étaient assez confuses mais j’essayais d’être le plus clair possible. Je ne voulais pas la mettre en danger en lui en révélant un peu trop mes pensées. Je connaissais les risques. Et j’étais tellement terrifié à ce qu’il pourrait nous arriver que je préférais m’auto censurer sur ce sujet. Rompant notre étreinte, je me levais rapidement et tendais la main à Miho pour qu’elle puisse faire de même. Je tentais malgré tout, d’effacer la gêne en lui adressant un sourire rayonnant. Pour lui montrer que j’étais quand même content, malgré tout.

Trop absorbée par la source de son désordre mentale, la demoiselle n’avait pas écouté, du moins seulement d’une oreille. Elle alla aux toilettes histoire de se calmer, mais rien n’y faisait et pour ne pas perdre de temps, sachant qu’il fallait bien un jour qu’elle fasse part de ses sentiments à l’ange gardien, elle s’assit, sans le regarder, tandis qu’il lui prenait la main, lui assurant qu’il allait dormir parterre. Chose bien entendu, qui ne la fit toujours pas tilter malgré le fait que Kanon se soit répété. La Nippone prit son courage à deux mains, se sentant légèrement rassurée qu’il la soutienne malgré le fait qu’il ne savait pas encore ce qu’elle allait lui dire. Elle se lança, le cœur serré par un étau invisible… la gorge nouée et la boule au ventre tant elle redoutait sa réaction. Il avait fui une fois et… cette fois-ci ne pouvait pas le faire. Miho savait parfaitement qu’il ne la jetterait pas dehors, même si c’était elle qui cherchait à fuir ses responsabilités. Les rôles s’inversaient doucement…

Le serveur semblait réfléchir et pendant qu’il fermait les yeux, notre intrépide demoiselle l’observa du coin de l’œil, très discrète (ou pas). Elle se mordit la lèvre, reprenant la parole alors qu’il hochait la tête, toujours aussi calme et sans mot dire. Il avait cependant pris des couleurs, ce qui laissait présager à la lycéenne qu’il partageait peut-être ses sentiments ? Elle ne voulait pas en espérer tant, l’écoutant cette fois-ci attentivement. Elle le savait… elle l’avait toujours su… c’était strictement interdit… pour cette raison, elle ne répondit pas, mais elle ne s’était pas attendue à ce que son protecteur la prenne dans ses bras pour la serrer fortement contre lui ! Légèrement chamboulée, elle se serra un peu, réprimant quelques larmes, enfouissant son visage dans le cou du jeune homme. Les paroles qui suivirent la rassurèrent, faisant bondir son pauvre petit cœur une fois de plus… puisqu’il avouait indirectement qu’elle ne lui était pas indifférente.

Notre demoiselle se décida à le laisser tranquille, souriant faiblement et prenant la main tendue de son ange, le suivant pour aller se coucher, ils en avaient bien besoin. C’est alors qu’elle se souvint de ses paroles et rougie légèrement, pour elle il était hors de question qu’il dorme parterre dans sa propre maison…

« Je dormirais parterre… c’est chez toi il me semble… alors, je dors parterre »

Elle se mordit la lèvre, relevant ses yeux, se les frottant légèrement après avoir soutenu le regard surement provocateur du jeune homme. Depuis leur rencontre, c’était une sorte de jeu, celui qui tiendrait tête le plus longtemps et bien que la demoiselle tenait le coup, elle commençait à flancher… mais s’il dormait parterre, elle allait faire de même et le lit se retrouverait vide… que c’était dommage ~ à coup sûr, ils allaient être contraint de dormir ensemble, sans l’avoir véritablement choisi, mais comme ils sont têtus tous les deux… il y avait de fortes chances. Mais la tenue de la Nippone n’était pas véritablement adéquate pour dormir paisiblement, pour dormir tout court même puisque sa tunique risquait de se soulever… et par la même occasion, ce devait être très inconfortable étant donné les fins tissus au niveau des épaules. Allait-il s’en rendre compte ? Miho n’allait pas lui en parler en tous les cas, bien trop honteuse.

Au bout d’un certain tant à débattre avec Kanon, parfois silencieusement, un regard suffisant, ils finirent par se coucher dans le même lit, loin, très loin l’un de l’autre. Elle n’osait plus rien demander, bien trop submergée par ses émotions et surtout… par le fait que ce soit partagé… mais impossible, tout aurait été si simple si elle avait déjà eu quelqu’un, mais non… il avait fallu qu’elle choisisse le plus beau des anges, l’interdiction absolue… c’était son cœur qui avait parlé certes, mais elle s’en voulait terriblement. Elle était assise, sur le bord du lit, torturant sa lèvre inférieure, est ce qu’elle pouvait vraiment tenir le coup ? Est-ce qu’elle n’allait pas se retrouver dans ses bras au beau milieu de la nuit ? Elle secoua violemment sa tête, soupira puis s’allongea, dos à Kanon, désireuse de faire le vide dans sa tête bien que ça n’était pas possible ces derniers temps. Elle tenta néanmoins de trouver le sommeil, le cœur battant en entendant l’ange bouger à côté d’elle.

Je m’étais levé en lui prenant la main. Elle m’avait avoué qu’elle m’aimait et je l’admirais d’avoir eu ce courage. Je me dirigeais vers ma chambre, il commençait à se faire tard.

Soudain Miho sembla prendre conscience de ce que je lui avais dit quelques instants auparavant. Elle m’assura que ce devait être elle qui dormirait parterre. Hors de question. Sur le seuil de la chambre, je lui lançais un regard qui voulait tout dire. Elle ne voulait pas que je dorme parterre et je ne voulais pas qu’elle dorme parterre. Nos regards s’affrontèrent un moment. Pourtant nous nous rendions à l’évidence, aucun de nous ne semblait vouloir céder à l’autre. Deux vraies têtes de mules. Même si aucunes paroles ne furent prononcées. Nous nous comprenions parfaitement, et Miho alla s’assoir sur un coté de mon lit.

Mon cœur s’emballa de façon brusque et c’était mon tour de filer à la salle de bain. Je me penchais devant le lavabo, et m’aspergeais le visage et les avants bras d’eau. J’avais l’impression que mon corps tout entier était en feu. J’hésitais un moment à prendre une douche. Mauvaise idée. Mais dans quelle tenue dormir ? La dernière fois était différente puisque je n’étais pas dans le même lit que Miho, j’avais pu enlever mon tee shirt discrètement. Et si j’attendais que Miho s’endorme pour l’ôter ? Bonne idée. J’enfilais rapidement un vieux survêt’ et un tee shirt simple. Je revenais dans la pièce sur la pointe des pieds, mais la miss ne dormait pas encore. Puis en voyant Miho, je m’apercevais qu’elle n’avait pas des habits très confortables pour dormir. Je retournais rapidement chercher un grand tee shit dans mon armoire.

- Tiens, tu peux enfiler ça si tu veux. Ça me va grand donc je pense que ça te fera une chemise de nuit à la bonne taille.

J’étais de plus en plus mal à l’aise. Mais je ne voyais pas d’autres solutions et il n’était pas question de laisser Miho repartir à une heure aussi tardive. J’étais à la fois content de l’avoir aussi prés de moi et effrayé d’avoir déraisonnablement envie d’être encore plus proche d’elle.

J’éteignais la lumière principale et m’allongeais enfin. Miho fit de même en se mettant dos à moi. J’aurais bien aimé la voir dormir mais elle était surement aussi gênée que moi. Le lit était quand même très grand et j’avais l’impression que la distance entre nous deux était suffisante. J’éteignais la dernière lumière et fermais les yeux. J’entendais nos deux souffles à l’unisson, c’était très apaisant. Mais pourtant le sommeil ne venait pas. Lentement et sans faire de bruit, je retirais mon tee shirt. J’étais à moitié conscient, à moitié dans un rêve.

Et dans ce rêve, j’étais couché dans un champ de fleurs, Miho à mes côtés. Je souriais beaucoup. Mais quelque chose n’allait pas. Nous étions trop loin l’un de l’autre. Je franchissais l’espace qui nous séparait en roulant sur moi-même et je l’attrapais par la taille. Je voulais sentir sa peau contre la mienne, humer son délicat parfum. Je voulais qu’elle soit mienne et ça pour toujours. Les fleurs tournoyaient autour de nous. Et nous étions heureux, mon torse sur son dos et ma main sur sa taille. Je déposais aussi ma joue contre la sienne. Il n’y avait aucun bruit. Tout était paisible, et tout brillait, d’une beauté incroyable. Mais c’était elle la plus belle. Elle avait une simple robe bustier de couleur pêche, les cheveux noués en longues tresses. Une vraie déesse. Le temps s’arrêtait. Elle et moi. Il n’y avait plus rien d’autre au monde. Plus rien ne comptait à part elle. Je sentais le soleil sur ma peau. La chaleur était agréable et douce. Comme une caresse…

J’ouvrais les yeux et distinguais des formes. J’étais vraisemblablement dans ma chambre, couché sur le dos. Nous étions au petit matin. Alors tout cela n’était qu’un rêve. Au fur à mesure je me réveillais et je prenais conscience de la soirée que nous avions passée. Je me frottais légèrement la tête, dans un état second.

Soudain mes yeux s’ouvrirent brusquement. Je prenais conscience d’une chose. Je n’étais pas seul. Et la distance que nous avions mise hier soir n’était visiblement pas suffisante puisque Miho dormait paisiblement, couchée sur moi, la tête sur mon torse. Ce n’était pas normal ça. Je fermais les yeux pour les rouvrir, persuadé que j’étais encore en plein rêve. Visiblement pas. Notre position était vraiment des plus gênantes. Mais qu’est ce que nous avions fait cette nuit pour en arriver là ? Qu’est ce que j’avais fais ? Une chose de sure, nous n’avions rien commis d’interdit, j’en été persuadé. Il faut être conscient pour faire ces choses là. Et j’ignorais encore que j’allais un jour me lasser de la prendre dans mes bras. Qu’un jour je finirais par en vouloir plus. Que ça avait déjà commencé. Chassant ses idées peu claires de ma tête, j’essayais de profiter du moment présent, chose que je ne faisais jamais. Je sentais les battements de cœur de ma demoiselle, réguliers et apaisés, je savais que quand elle se réveillerait, son pouls monterait en flèche. Un petit sourire en coin, je savais que la scène serait culte. J’aurais bien voulu la remettre là où elle se trouvait quand nous nous étions endormis, mais j’avais peur de la réveiller en faisant ça, et elle risquait de le prendre mal. Mais si elle se réveillait et qu’elle voyait que j’étais réveillé, elle risquait de penser que j’avais fait exprès non ? M’inquiétant plus sérieusement de sa réaction à son réveil, je refermais les yeux, feignant de dormir.

Pauvres tourtereaux qui n’osent s’avouer leur désir d’être proche… proche, ou plutôt encore plus qu’ils ne le sont déjà malgré eux. Tout les sépare… leurs époques, leurs mondes, leurs natures… et pourtant ils n’ont qu’on seul désir qu’ils s’efforcent chacun de faire taire le plus fortement qu’il soit. La véritable question n’est pas « comment ils y parviendront » mais plutôt « combien de temps cela va-t-il durer ». C’était pourtant très simple, l’amour n’avait jamais était compliqué en soit, l’homme en revanche l’avait toujours était… l’homme, mais son créateur aussi… et aussi vil que cela puisse paraitre il y avait du bon, la raison n’a de cesse que de rappeler ce qui est bon et mauvais… bien et mal… et surtout ce qui peut ou ne peut pas être. En l’occurrence, cette relation ne DEVAIT pas être… mais était bel et bien existante. Miho releva sa bouille pour récupérer le tee-shirt après que Kanon fut revenu de son petit brin de toilette pour ensuite lui ramener le vêtement. Soulagée, la demoiselle sourit, se rendit dans cette même salle de bain qu’il avait foulée quelques secondes avant elle pour se vêtir de son habit… qui allait parfaitement à sa taille selon elle. Elle n’avait pas osé allumer la lumière ni même se regarder pour croiser son propre regard, reflet du miroir… sadique, nous devons bien l’avouer puisqu’il lui avouerait toutes ses craintes… toutes ses fautes, qu’elles soient vraies ou non.

Elle le remercia et finit par revenir, s’allongeant dans le lit et aussi vaste qu’il soit, elle pouvait entendre le souffle du jeune homme une fois les lumières éteintes… se concentrant sur se dernier pour apaiser ses craintes malgré le fait qu’elle mourrait de ne pas pouvoir être plus proche. La Nippone se mordit la lèvre, ne faisant aucun rêve. Elle avait eu beaucoup plus de mal à s’endormir, feintant bien sûr qu’elle dormait en n’ayant bougé sous aucun prétexte. Même les bruits de frottement des draps ou… celui d’un vêtement qu’on retire. Le cœur battant, elle s’était rapidement trouvé entre les bras de son ange… et bizarrement n’eut aucune force pour le repousser. Elle n’en avait aucune envie et par la même occasion s’endormait paisiblement dans le creux de ses bras. C’est une fois que le marchand de sable fut passé qu’elle put se mettre à rêvasser. La voila projeté dans son rêve, dans une ville, rien de bien surprenant jusqu’à présent si ce n’est que de ses yeux elle pouvait voir les anges… ils ne tombaient pas du ciel, bien sûr que non… mais quelques-uns avaient des ailes… et alors qu’elle était perdue, son corps tout entier fut recouvert de caresse, des plumes blanches étincelantes qui finirent par s’écarter lentement alors qu’elle se retournait pour faire fasse à l’unique personne qui avait droit d’être à ses côtés de cette façon…

Kanon resplendissait, un sourire calme, comme à son habitude, mais il avait quelque chose de changé. Aussi ridicule que cela puisse paraitre, Miho était entre ses bras, ce dernier les ayant refermés autour de sa taille tandis qu’elle semblait ne pas comprendre. Lentement, l’ange s’était approché… déposant ses lèvres contre les siennes… c’est à cet instant qu’elle ouvrit les yeux, sans se rendre vraiment compte. Puis se releva doucement en s’appuyant sur le matelas. Quelque chose lui soufflait dans le cou, légèrement dévoilé par le col bien trop grand de la « chemise de nuit » qu’elle trouvait la veille sur mesure. Elle se frotta passablement les yeux avant de les écarquiller et de couiner, faisant un bond qui la propulsa au sol à cause du drap, qu’elle avait d’ailleurs entrainé dans sa chute. Complètement gênée, rouge de honte et surtout ne voulant pas réveiller Kanon bien qu’elle se doutait que sa voix allait résonner dans la pièce d’ici peu, elle rampa sous le lit malgré le peu d’espace qu’il y avait (c’est pour dire à quel point elle était fine pour pouvoir passer là-dessous °°) puis y resta. Sa tenue était… très provocatrice et bien que l’on puisse croire qu’elle était habituée, ce n’était pas le cas ! Notre casse-pied nationale était du genre à… ne pas le faire exprès, preuve en est elle s’était comportée tout autrement en remarquant que ses tuniques étaient courtes.

N’entendant aucun bruit, la lycéenne se disait que la voie était libre, sauf qu’en face d’elle se dressèrent des pieds… oh non… horreur et damnation ! Elle se mordit la lèvre, se planquant sous le drap, ce qui n’était pas bien difficile, Kanon pouvait aisément attraper ce dernier et récupérer dans ses filés la belle brunette puisqu’elle était emmêlée à l’intérieur… ce serait assez comique cela dit. Revenons à nos moutons. La demoiselle hésita à montrer signe de vie… après tout, il devait surement croire qu’elle s’était enfuie ou bien… qu’elle était morte étouffée sous son lit, ce qui n’était, en soit pas très drôle. Surmontant donc sa honte, elle finit par parler d’une toute petite voix.

« O… oui je suis sous le liiiit… Tu… tu as bien dormi ? »

Elle se sentait ridicule à se comporter ainsi, mais que voulez-vous . La honte nous faisait agir bizarrement parfois… et bien décidé à rester là tant que le jeune homme était dans la chambre et… qu’elle n’avait pas ses vêtements sous le nez… ça risquait d’être fort joyeux de pouvoir converser avec elle. Surtout qu’elle était d’autant plus perturbée par ce rêve et par ce baiser plus vrai que nature… Pourtant, elle était persuadée qu’il n’aurait pas osé… si ? De toute façon…, ce n’était pas elle qui allait le lui demander, quoi que…. Bien curieuse de savoir comment ils avaient pu se retrouver dans cette position, elle commençait à avoir chaud sous le lit ~ Alors Kanon, qu’as-tu fait ? Et que comptes-tu faire à présent ? Te délivrer et par la même occasion la délivrer également de vos tourments inutiles ? Ou bien poursuivre le courant de ta vie de protecteur comme il se doit… en terrant au plus profond de ton être ce qui aurait fait de toi à jamais un homme comme tu ne l’as jamais été ? ~

J’avais eu raison…Le réveil de Miho fut mémorable. Alors que je faisais semblant de dormir, je rouvrais un œil distraitement. Puis le deuxième. Elle en mettait du temps à se réveiller. Elle devait être épuisée à cause d’hier. Pauvre petite chose. Elle soupira d’aise et se mit à sourire dans son sommeil. C’était vraiment mignon. En la regardant ainsi, son visage à quelques centimètres du mien, j’eus une idée. C’était une chose que je voulais faire, que je voulais essayer. Franchement, dans ces instants, je ne pensais pas du tout au Grand Patron ou aux répercussions que mes agissements pouvaient avoir. C’était égoïste et complètement insensé. Même Miho ne serait au courant de rien, dormant à poings fermés. C’était aussi une façon de me prouver une fois de plus, que j’étais vraiment en train de tomber amoureux. A lenteur d’escargot, j’approchais mon visage du sien et déposais un baiser sur ses lèvres. Et je ne fus pas déçu des sensations que je ressentis à ce moment. Nos lèvres entrèrent en contact et mon cœur se mit à s’affoler, mes mains devinrent moites et une chaleur à la fois étrange et douce m’envahit. Soucieux de ne pas en faire trop, je m’étais suffisamment corrompu comme ça, je reposais rapidement ma tête sur l’oreiller. J’avais frôlé ses lèvres en même pas un quart de secondes mais j’avais eu ma dose.

Soudain je me sentais désemparé, c’est comme ci toutes mes obligations, mes devoirs et interdictions d’ange me revenait dans la figure comme une claque. Je n’avais jamais failli à une seule mission et j’étais en train de creuser ma propre tombe et celle de ma protégée avec mes agissements. Mais comment pouvais-je échapper à ça ? Je ne maitrisais rien, tout mon être entier réclamait la jeune nippone et je n’arrivais même pas à me résoudre à faire semblant d’une quelconque indifférence. Imaginer la repousser m’était insupportable. Je me passais un bras devant les yeux.

C’est le moment que choisi la miss pour émerger des bras de Morphée. Se frottant délicatement les yeux, elle compris très rapidement où elle se trouvait et je sentais (non sans douleur) ma protégée se relevait violemment..Sachant que je lui servais de matelas, je ne vous fais pas de dessin, mon bas ventre en pris un coup. Les yeux toujours fermés, je grimaçais en restant tout de même immobile.

Mais, le silence pesant de la pièce me poussa à ouvrir les yeux et à m’assoir doucement. Mais où était passé Miho ? Manifestement, je ne l’avais pas entendu sortir de la chambre mais..elle ne se trouvait plus dans mon champ de vision. Peut être dans la salle de bain ? Je me levais pour aller vérifier quand j’entendis une petite voix qui me demandait si j’avais bien dormi qui provenait de sous le lit. Tout d’abord surpris, je ne pus réprimer un petit rire moqueur en m’apercevant que la demoiselle avait élu domicile sous le lit, emportant une partie du drap avec elle. Je commençais à penser que j’aurais peut être du ouvrir les yeux au moment où elle se redressait, pour la voir faire un bond. En m’apercevant que j’étais torse nu depuis tout ce temps là, la gêne repris le dessus et je me demandais si elle avait eu le temps de me voir ainsi…Probablement pas. Mais en tout cas elle avait du sentir ma peau nu contre son visage et le rouge me monta une nouvelle fois aux joues. J’attrapais mon tee shirt et l’enfilais rapidement.

Je n’osais pas regarder sous le lit. Je savais que Miho avait dormi vêtue avec mon vieux tee shirt et c’était bien léger. La lycéenne était pudique, je l’avais déjà remarqué et je la comprenais car c’étais aussi mon cas. Je me tournais donc, pour qu’elle puisse sortir de sa cachette tranquillement.

- Humm j’ai un peu trop bien dormi visiblement…excuse moi, je pense que c’est de ma faute si nous nous sommes retrouvé dans cette…position. Et toi tu as bien réussi à dormir ? Pardonne moi si ce n’est pas le cas, je ne savais pas que je pouvais bouger autant en dormant…hum…avec quelqu’un.

Pas besoin de préciser que je n’avais pas dormi avec n’importe qui. Voyant qu’elle tardait à sortir de dessous, je tenais à la rassurer.

- Tu peux sortir de là…je sais que tu as été surprise et j’en suis vraiment désolé, ça n’arrivera plus.

Je m’adressais plus à moi en prononçant ces paroles, une sorte de recommandation, il ne fallait plus que ça arrive, mais c’était tellement facile de briser ces résolutions. Quand je voulais tout le temps la serrer contre moi. Elle était la seule personne avec qui j’avais voulu me comporter différemment des autres. Je n’avais jamais ressenti de telles choses, que ce soit pour un humain ou pour un ange. Puis, sentant que j’avais besoin de me retrouver quelques instants seuls, je décidais de faire d’une pierre deux coups et d’excuser plus convenablement mon comportement pendant la nuit. Hop petite courbette et fuite discrète.

- Ne bouge pas, je vais te préparer un petit déjeuner au lit digne de ce nom. Enfin.. si.. tu peux bouger…si t’a besoin de la salle de bain n’hésite pas !

Sans attendre de réponse, je fonçais dans ma cuisine. Cacher ma gêne dans les fours, cela me semblait une bonne chose. Je préparais tout avec une étonnante rapidité, il y avait de tout sur le plateau … du riz, des toasts à la confiture, une pomme (j’avais entendu que « pomme » et « excuses » se prononçait de la même façon en coréen), du jus de fruits, bref un plateau très complet …des fibres, des vitamines..de quoi commencer la journée en beauté.
Je revenais dans la chambre, le plateau dans une main, le sourire était de retour, ils nous restaient encore quelques heures avant que la « réalité » reprenne le dessus. Je priais juste pour que notre petite matinée « en amoureux » ne s’arrête pas trop vite. Je m'assis doucement sur le matelas et posais mon plateau de victuailles.

À ce qu’elle se sentait ridicule sous le lit d’un seul coup… mais la voix de son ange gardien finit par retentir à sa réponse, ayant d’ailleurs rit… elle ne lui en voulait pas trop, il avait raison, elle en aurait fait de même… après tout elle avait eu une réaction légèrement excessive ? Soit, la surprise l’avait légèrement secoué le fait qu’il entretienne un minimum la conversation l’aidait à se détendre bien que notre petite poupée était plus préoccupée par sa tenue et par comment elle allait sortir pour se retrouver face à Kanon sans qu’il n’ait d’envie de lui sauter dessus. Oh, bien sûr… elle ne se doutait pas qu’il en avait déjà envie, mais, se mordit la lèvre à l’idée qu’il puisse la regarder comme aucun homme ne l’avait fait jusque-là, c'est-à-dire en tant que femme. Elle était flattée, mais… quelque peu gênée par cette nouvelle condition, cette nouvelle vision… et souris en l’entendant de nouveau ouvrir la bouche. Elle prit son courage à deux mains et soupira pour ensuite répondre.

« Je… j’ai bien dormi… hm… pas ta faute… c’est comme ça… »

Puis, soucieuse de sa tenue, elle fit la moue sous le lit, décidé à sortir… sauf qu’elle n’en avait aucune envie… elle n’était pas prête à affronter le regard d’homme de Kanon, bien qu’elle y ait eu à faire à maintes reprises, c’était une fois de plus différents puisque cette fois-ci ils avaient mis des mots sur leurs ressentis, des mots puissants qui changeaient indéniablement leur comportement, et ce, pour toujours ? La Nippone se mordit la lèvre, couinant.

« Je suis bien sous ton lit… c’est ahum… confortable ? Tu devrais essayer… UN JOUR… pas aujourd’hui hein… »

De plus en plus comique cette situation ! Finalement, son protecteur s’était enfui en prétextant préparer un déjeuner digne de ce nom et la petite poupée s’extirpa de sa pseudo cachette, allant récupérer ses affaires. Il l’avait autorisé à passer à la salle de bain, voila qui était convenable ! Discrètement, Miho se balada sur la pointe des pieds en trottinant pour récupérer ses affaires et ainsi aller prendre une douche. Elle prit cependant grand soin d’attache ses cheveux pour ne pas mettre de l’eau partout et quelques minutes plus tard, très peu d’ailleurs pour une demoiselle, elle alla se poser dans la chambre, ses vêtements sur le dos, s’amusant à faire frisotter une de ses mèches en réfléchissant à leur situation.

Pas le temps de penser, l’ange arrive avec un plateau et le dépose lentement sur le matelas, de quoi faire frissonner notre demoiselle, qui avait cru voir du rouge sur les joues de ce dernier. Est-ce qu’il était aussi mal qu’elle ? Surement, en tous les cas elle ne regrettait rien, se mordant lascivement la lèvre non sans dévorer du regard son adorable protecteur et… presque amant par ailleurs. Lorsqu’elle s’en rendit compte, elle prit un morceau de pomme, s’étant au préalable approché pour pouvoir remercier Kanon de lui avoir offert le petit déjeuner puis elle soupira, essayant de rectifier leurs comportements, n’aimant pas s’éloigner de lui.

« hm… désolé pour tout à l’heure j’étais… hm… surprise. Tu as enfin… »

Les mots ne venaient pas et ça avait le don de l’énerver, ce pour quoi elle souffla un bon coup, marchant à quatre pattes sur le lit sans renverser le plateau, juste pour atterrir contre le dos du serveur, posant sa tête timidement ainsi qu’une de ses mains. Son cœur battait la chamade tandis qu’elle essayait de se concentrer pour que le rouge ne lui monte pas aux joues, souriant en se disant que c’était idiot d’être amoureux, car de simples gestes qu’elle avait pour habitude de faire en sa présence pouvaient se transformer rapidement en embarras. Miho ferma ses yeux, soupirant, soulagée d’avoir, ne serait-ce qu’approché Kanon sans qu’il ne soit dans un état second.

« Pardon, mais… ça… ça m’énervait de ne pas agir comme d’habitude… hm… je suis contente qu’on en ait parlé et… je suis aussi contente que ce soit partagé… j’espère qu’on trouvera une solution… »

Mais Miho démontrait par ses gestes qu’elle saurait être patiente, quoi qu’il arrive et que de toute évidence elle se résignât à choisir la solution que Kanon choisirait, elle ne rechignerait pas, préférant lui laisser la lourde tâche de lui dire ce qu’il en était, bien que pour l’instant, ce n’était pas le sujet. D’ailleurs, elle prit un autre morceau de pomme, ne mangeant pas beaucoup le matin alors que c’était important. Aujourd’hui elle n’avait pas cours de la matinée, du moins elle s’en exemptait voir même une journée complète, après tout la veille elle n’avait pas eu cours après être venu en début d’après-midi pour voir Kanon alors, il pouvait très bien croire qu’elle n’avait pas cours non plus.. Elle manigançait déjà… pour rester un peu plus de temps avec lui, un sourire naissant au coin de ses lèvres, la voilà déjà bien plus calme et bien plus apte à faire face à Kanon.

D’humeur taquine, avec un léger recule de leur soirée, la demoiselle se pencha un peu pour passer une de ses mains dans ses cheveux, espérant d’ailleurs le faire changer d’avis sur les massages de tête… elle appréciait fortement et ne comprenait pas pourquoi ce n’était pas le cas de son ange, pour elle s’était inconcevable. Elle sourit, posant sa tête sur l’épaule du jeune homme, y allant lentement pour qu’il ne prenne pas cela pour une agression. D’ailleurs, sa douceur était exemplaire, contrairement à ce qu’on pourrait croire de Miho, elle savait y faire quand elle y mettait du sien.

Après que Miho m’ai appris que le dessous de mon lit était confortable, mais que je devais essayer un jour, pas maintenant, je compris enfin que la demoiselle devait avoir besoin d’un peu d’intimité et filais dans ma cuisine pour préparer un plateau déjeuner. Petit déjeuner au lit…que demander de mieux ? Je n’avais jamais eu l’occasion de faire ça mais, en le voyant à la TV, j’avais toujours eu envie d’essayer. Assis sur le matelas en indien, je me servais une tasse de thé et attrapais les baguettes pour manger un peu de riz. Miho attrapa un morceau de pomme et s’approcha de moi en s’excusant pour tout à l’heure. D’un petit geste de la main je lui faisais comprendre que c’était inutile.


- Non ne t’excuses pas. C’est déjà oublié.

Mais je me taisais bien vite puisqu’elle n’avait pas fini sa phrase. Un sourcil relevé, j’observais la petite poupée qui semblait exaspérée de ne plus trouver ces mots. Elle finit par faire le tour du lit à quatre pattes pour se poser sur mon dos. Sans un mot, je la laissais faire, conscient que ces moments nous étaient peut être compté. Elle m’expliqua alors que ça l’énervait de ne pas agir comme d’habitude, et qu’elle était contente qu’on en ai parlé, qu’on ai pu mettre nos cœur à nu comme on le voit si souvent dans les romans à l’eau de rose. Même si elle ne nommait pas la chose par son nom je savais qu’elle parlait de nos sentiments. Elle espérait qu’on trouve une solution. Je baissais la tête, penaud. Une solution…si vraiment une telle chose existait…j’aurais fait n’importe quoi pour la trouver. Pourtant j’avais beau retourner le problème maintes et maintes fois dans mon esprit, je ne trouvais pas de solution. Je savais juste qu’un jour ou l’autre je devrais assumer ce que je ressentais pour la miss qui était contre mon dos. Et ce jour là je saurais prendre mes responsabilités. Quoi qu’il en soit j’essaierai de tout faire pour le mieux et de ne pas la blesser.

C’est en ressassant ces mauvaises pensées que je sentis une main s’immiscer dans mes cheveux. Un petit regard en coin me confirma sans grande surprise que Miho avait bel et bien décidé de passer outre la règle que je lui avais imposée dès notre rencontre. Je tentais d’abord de bouder en faisant semblant que ce geste m’était égal. Mais elle continuait et s’en était trop. En deux secondes je me retournais et la plaquais contre le lit, les deux poignés emprisonnés par mes mains. Bien que j’avais fait attention à ne pas renverser le plateau, je n’avais pas trop réfléchi à mon geste…Celui là étant venu naturellement. Et, comme à mon habitude je me retrouvais dans une situation gênante sans vraiment en prendre conscience. Ce n’était pas mon intention première. Mais je décidais de me venger pour m’avoir caressé les cheveux. Délicatement, j’approchais mon visage du sien, elle ne pouvait pas bouger car je la tenais fermement. Pas assez pour lui faire mal mais assez pour l’empêcher de gigoter. Mes yeux se plantèrent dans les siens. A quelques centimètre de sa peau, je décidais de ne pas céder à la tentation (un ange est sensé respecter les 7 péchés capitaux non ?) et mes lèvres dévièrent leur chemin pour se placer devant son oreille. Je chuchotais.


- Je t’avais prévenu que si tu me touchais les cheveux je risquais de devenir embêtant. Maintenant attend toi à des représailles, petite !

Mais j’étais un ange et c’était bien ça le problème : je ne savais pas me venger. Hésitant un moment, je finis par lui lâcher les poignets. Quelle vengeance minable ! Elle avait les pommettes rouges et surement moi aussi. J’étais à moitié couché sur elle…on a connu plus convenable comme position. C’est pour ça que je me relevais gentiment, légèrement déçu de ne pas avoir trouvé de vengeance équitable et assez embarrassé de ce que je venais de faire. Je prenais quand même soin d’ébouriffer gentiment la lycéenne, un sourire en coin.


- Allez mange Miho ! Et arrête de te préoccuper de cet imbécile qui te sert d’ange gardien !

Je me servais un grand verre de jus d’orange que je buvais d’un trait. J’en servais un aussi pour Miho. Comme d’habitude je l’observais et je n’arrêtais pas de me dire que je deviendrais peut être rapidement un poids pour elle, même si elle n’en avait pas conscience. D’ailleurs récemment j’avais vu une émission sur les adolescents et cela m’avais fortement intrigué. Il fallait que je sache vraiment ce qu’il en était. Reposant mon verre, j’inspirais un grand coup avant de choisir mes mots avec précautions pour ne pas la vexer.


- Je sais que je t’ai déjà posé une question similaire la dernière fois mais ..hum…Est-ce que tu as déjà ressenti ce que tu ressens pour moi ? Avec quelqu’un de ton école par exemple… un garçon de ton âge ? Tu n’es pas obligé de répondre.

Dire que je ne pensais pas au démon de la dernière fois aurait été un mensonge. J’avais une confiance aveugle en Miho et je savais qu’elle ne me racontait pas de mensonges. Mais j’étais quand même un peu curieux de savoir ce qu’il en était vraiment. En fait je crois que j’avais envie d’entendre que j’étais le seul. Pourtant je savais aussi que dans le cas contraire, je n’avais aucun droit sur la petite Nippone. Je détestais ce sentiment égoïste qui m’envahissait de plus en plus souvent. Une des notions fondamentales là-haut était le partage, l’amour universel...etc.…
C’était des valeurs auxquels je restais attaché et sentir que j’étais en chemin inverse…cela me faisais sentir coupable. La tête baissé et l’air un peu triste, je finissais par lui avouer ce pourquoi je lui avais posé cette question.


- Je suis désolé. Je …sais que je n’ai aucun droit, je ne te mérite même pas. Mais j’avais besoin de me sentir rassuré. C’est totalement stupide et irréfléchi n’est ce pas ?

Kanon était revenu quelques instants plus tard dans la chambre qui leur avait servi de nid douillet, bien qu’il ne soit pas officiellement un couple, n’ayant échangé qu’un baiser volé, ils se comportaient comme tel l’un envers l’autre, se confiant l’un à l’autre. Ils étaient très tactiles et le fait qu’il ne soit pas encore un couple commençait à devenir gênant pour la demoiselle. Après s’être excusé, elle avait opté pour trouver une solution, bien sûr le plus rapidement possible même si ça ne risquait pas d’arriver. Quoi qu’il en soit, la Nippone refusait de laisser passer le seul homme qui jusqu’à présent avait fait battre son cœur et avait mis un peu de piment dans sa vie. Non en plus d’être le seul, il était son protecteur, situation des plus compliquée qui pourtant pourrait s’arranger si facilement si tous deux n’étaient pas à cheval sur cette règle d’or qu’il ne fallait pas enfreindre. Que faisait-il de mal ? Il n’était pas question de procréation, évidemment… alors pourquoi toute la terre devrait savoir qu’un ange et une humaine s’aimer éperdument ?

Elle soupira, s’amusant avec les cheveux de son protecteur, ne serait-ce que pour détendre l’atmosphère, mais ça n’en fut que plus compliqué puisqu’il s’était subitement retourné pour la bloquer. Il était sur elle, son visage à quelques centimètres et après avoir prononcé quelques mots à son intension s’était relevé. Tu sais Kanon… si tes punitions sont à ce point enivrantes, Miho en réclamera plus qu’elle ne l’avait fait jusque-là. C’était à prévoir… si le seul moyen de lui faire perdre la tête était de passer ses petites mains dans les cheveux mi-longs de son futur amant, alors elle n’hésiterait pas… encore qu’elle est bien trop respectueuse pour lui infliger pareil supplice. Devoir choisir entre risquer son rang et partager son amour, c’était presque lui demander l’impossible. Le serveur demanda alors si elle avait déjà ressenti quelque chose de similaire pour un jeune homme de son âge, ce à quoi la demoiselle rougit, lui tapant légèrement l’épaule. Elle n’avait pas envie de répondre, pourtant… ce qui suivit la fit frissonner. Cela faisait deux fois qu’elle l’entendait parler de lui comme s’il était le pire des protecteurs, le pire des hommes… alors qu’il était à ses yeux, sans doute le plus compréhensif et le plus doux qu’il soit.

« Kanon… »

S’asseyant alors à ses côtés sans faire tomber le plateau, elle le regarda dans les yeux, portant sa main à sa joue pour la lui caresser. Puis elle appuya son front contre le sien, même si c’était assez gênant et… nouveau de sa part depuis ce fameux incident dans sa chambre en internat, elle reprit la parole.

« Arrête… si j’ai envie de m’inquiéter pour toi, je m’inquièterais… et puis, je sais que les humains peuvent aimer plusieurs fois… mais ce n’est pas mon cas… il n’y a eu que toi… et il n’y aura que toi… je suppose que ce qui fait de moi que je suis spéciale… y est pour quelque chose »

Puis elle s’éloigna de lui, gentiment, prenant le verre de jus d’orange en le lui montrant bien, buvant pour qu’il ne s’inquiète pas à son tour. L’humaine prit un peu de riz afin d’apaiser l’esprit contrarié de son ange et une fois terminé, lui tira la langue, souriant de nouveau.

« Et puis tu es loin d’être stupide. De tous les anges que j’ai connus… jusqu’à présent tu es le seul… qui soit à mes yeux, véritablement dignes d’en être un. Je n’aurais pas aimé avoir un robot… les humains possèdent des sentiments et la plupart des anges, s’ils sont rassurant ne peuvent pas guérir toutes les blessures… parce qu’ils ne les comprennent pas pour la plupart… tu dois en savoir quelque chose hm ? »

Une petite leçon qui lui prouvait bien que, même s’il était « défaillant » aux yeux de ses camarades, pour toute l’humanité, il était digne d’être le plus grand. Elle reprit la parole, posant sont index aux creux des lèves du jeune homme pour qu’il n’ait pas dans l’idée de répliquer avant qu’elle n’en ait terminé.

« Amour, amitié, déception, tristesse sont des mots que vous connaissez… mais que la plupart ne comprennent pas. Toi, tu es différent… et s’il y avait un peu plus d’anges comme toi… crois-moi, cette planète serait le paradis sur terre… »

Espérant que cela soit rassurant pour l’ange, elle se leva doucement, se penchant sur Kanon pour pouvoir lui offrir ses bras. C’était comme si elle sentait, comme si elle comprenait qu’il avait besoin de tendresse et plus que tout de réconfort. Certes, l’ange ici était Kanon… mais il était sur terre… et toute personne en ce bas monde, quelque soit son titre était voué à protéger et être protégé.

« Je ne sais pas combien de fois je vais devoir te le dire… mais à mes yeux tu es parfait Kanon… alors arrête de t’en faire… et puis… autre précision… ce n’est pas parce que tu es mon ange gardien que tu n’as pas le droit d’être rassuré… »

Il fallait dire qu’elle savait également profiter de la situation puisqu’elle était plus qu’heureuse de pouvoir l’avoir contre elle sans qu’il n’y ait de malaise. Par ailleurs, savoir que lui aussi avait des craintes, bien que ça lui faisait tout autant peur, la rassurait néanmoins concernant ses sentiments et ceux du bel ange. Elle lui caressa la joue, puis prit le plateau sur elle pour se rasseoir et tendre ses baguettes au jeune homme qui n’avait pas beaucoup mangé lui non plus.

« Allé Kanon, fait aaaaaaah »

Évidemment, elle se moquait légèrement, voyant qu’il buguait un peu, mais elle ne voulait pas que ce soit comme ça, ni même que leur relation change, si ce n’est pour s’améliorer. De plus, ne sachant de toute façon pas quoi faire étant donné qu’ils ne sont pas un couple des plus « normal » elle devait bien tenter un peu d’humour pour se détendre et détendre aussi le jeune homme afin de bien commencer.

Après mes questions maladroites, Miho me tapa légèrement l’épaule. Je cru comprendre qu’elle ne répondrait pas à mes interrogations et, au fond, j’aurais compris pourquoi. Je n’étais pas le mieux placer pour ça. J’avais encore peur d’exposer mes sentiments au grand jour, alors que je n’hésitais pas à lui demander de le faire pour moi. Je me serais détesté pour ça.

En prononçant mon prénom, elle s’approcha de moi, en poussant le plateau. Je n’étais jamais « préparé » à nos câlins. Quand elle s’approchait de moi, tout mon corps frémissait. Combien de temps est ce que j’allais arriver à tenir sans me laisser aller. Au fur et à mesure qu’elle se rapprochait, je me sentais comme une bombe à retardement. Un jour, je savais que j’exploserais, que je n’écouterais plus ma raison et que mon cœur me dirait quoi faire. Elle passa une main sur ma joue. Le geste était tendre et je la laissais faire en fermant les yeux, pour ne sentir que sa main sur ma joue, juste l’espace de quelques secondes. Puis son front vint se poser sur le mien. Surprit, j’ouvrais les yeux…et les plongeaient dans les siens. Elle était habile, beaucoup trop. Contrairement à moi, elle savait me rassurer avec un geste, une parole. Mais, ce n’était pas suffisant pour elle et elle me demanda d’arrêter. Elle avait le droit de s’inquiéter pour moi. Puis elle m’avoua qu’il n’y avait eu que moi, qu’il n’y aurait que moi. Bien que j’étais déjà rassuré, cette déclaration me rendit irrémédiablement heureux. Bien que notre futur ensemble semblait incertain, ce qu’elle me dit me fit beaucoup plus plaisir que ce que je pensais. J’avais encore peur d’être encore plus amoureux que ce que je ne le pensais. Car maintenant je savais mettre un nom sur ce que je ressentais. Cette impression de se retrouver en entier était si agréable. La petite poupée m’expliqua qu’elle me considérait différent des autres anges, j’avais des sentiments et, de cette façon, j’étais mieux adepte à comprendre les humains. Ses compliments me touchèrent, même si elle avait raison, je savais aussi que je n’étais pas aussi bien qu’elle voulait le croire. Mais je ne répliquais pas, elle ne m’en laissait même pas le temps et elle m’offrait ses bras. Je ne pouvais franchement pas en demander plus et je me sentais même coupable de lui avoir demandé toutes ces choses. Elle me prouvait tout le temps à quel point elle était attachée à ma petite personne.

La petite nippone attrapa le plateau pour le mettre sur ses genoux. Elle s’était enfin décidée à s’alimenter. Sauf qu’elle me tendit du riz. Elle voulait « me nourrir » ? Intrigué et un peu amusé, j’haussais un sourcil mais ouvrais tout de même docilement la bouche. Un peu gêné, je finissais par lui attraper les baguettes des mains pour me resservir comme un grand.

- Merci.


Ce n’était bien évidemment, pas pour la bouchée de riz que je la remerciais, mais d’être là pour moi. D’être comme elle était. Elle ne risquait pas de comprendre mais je me sentais soulagé de le lui dire. Le ventre plein, un clin d’œil à ma protégée m’assura qu’elle non plus n’avait plus faim. Je ramenais le plateau dans ma cuisine et le débarrassais en sifflotant un air qui passait souvent à la radio en ce moment. En revenant dans ma chambre, je finis par m’apercevoir que j’étais encore en pyjama. Je me sentais mal à l’aise et un peu sale. Mais devais-je laisser Miho seule ? Ce n’était pas très poli de la part d’un hôte. Sacré dilemme ! Je finis par opter par une petite douche rapide, en ayant informé la jeune lycéenne au préalable.

- Je suis désolé...mais je vais devoir m’absenter quelques instants pour prendre une douche. Je te laisse le soin de nourrir Phileas si le cœur t’en dit.

Sans vraiment lui laisser le temps de répliquer je sautais dans ma salle de bain avec une chemise propre et un jean. Je fus rapide mais terriblement efficace. L’eau brulante avait détendu tous les muscles de mon corps et, à présent, je sentais l’amende douce, parfum de mon savon. Comme à mon habitude, je passais un temps fou à coiffer mes cheveux et faire en sorte qu’aucun épis ne me résistent. Quand je sortais enfin de la salle de bain, je n’avais passé qu’une bonne dizaine de minutes en tout dedans. Je cherchais des yeux celle qui avait capturé mon cœur, et trouvais enfin ma jeune protégée, dans mon salon. Je l’attrapais par la main pour que nous allions nous assoir sur le canapé. M’enfonçant dedans sans aucune élégance, j’étais totalement bien.

- Tu n’as pas cours aujourd’hui ? Je ne travaille qu’à partir de 13 heures en ce moment. En tout cas, tu peux rester si tu veux.

J’avais un peu honte car je ne savais pas quoi lui proposer de faire. Bien entendu, je n’avais pas envie qu’elle parte de si tôt mais je m’apercevais que mon appart ne regorgeais pas de distractions pour jeune fille de 17 ans. Pour jeune tout court. Franchement, j’avais 21 ans à l’extérieur mais on pouvait voir à mon logement que je n’étais pas si jeune que ça. Aucune console de jeux, pas de mangas, d’appareils électroniques sophistiqués comme les jeunes japonais d’aujourd’hui ont. Je savais que si mon ami Andréas était venu chez moi, il serait mort d’ennui. Pensivement, je me grattais la nuque en essayant de trouver de quoi nous occuper.


- Heuu…Miho…Est-ce qu’il y a quelque chose que tu aimerais faire en particulier ? Ou une chose dont tu voudrais me parler ? Je suis ouvert à toutes les propositions !

- Maintenant que j’y pense, je ne connais pas grand-chose de tes passions. Qu’est ce que tu aimes faire de ton temps libre ? Quand tu es toute seule chez toi par exemple.

Une fois le jeune homme rassuré, notre poupée voulut détendre l’atmosphère, mais Kanon n’était visiblement pas de la partie, un peu ailleurs ou surement son esprit plus vieux qui n’avait pas fait le lien avec la case « humour ». Quoi qu'il en soit, ce n’était pas important aux yeux de la petite nipponne qui, tout sourire, le laissait manger une dernière part avant qu’il ne lui fasse un clin d’œil et reparte, plateau entre les mains tout en sifflotant. Elle l’avait remis d’aplomb et souriait comme une idiote, éperdument amoureuse du visage d’ange qui la protégeait, elle le laissa filer à la salle de bain, acquiesçant en se pinçant le nez comme pour lui faire signe qu’il était grand temps. Mais à tous les coups, le serveur n’aura pas compris la blague et sera sans doute vexé, imaginant sa bouille totalement perdu, elle rit légèrement et attendit qu’il revienne.

Trouvant ces quelques minutes extrêmement longues sans l’élu de son cœur, la lycéenne soupira, écoutant l’eau couler. Elle ferma les yeux quelques instants, laissant son esprit perverti par ses envies sauvages de sauter sur son presque petit ami, dessiner les courbes du corps de Kanon. Ses cheveux trempés, sa musculature parfaite roulant sous les mouvements simples et pourtant si séduisants qu’ils devaient surement faire pour savonner toutes les parties de son corps… ses yeux fermés alors qu’il passe une main paresseuse dans sa nuque et son souffle chaud répercuté sur la vitre par un léger rond de bué. Miho frissonna, secouant la tête, conquise par son imagination débordante, elle voulut néanmoins se lever pour ne plus y penser. À coup sûr, elle ne pourrait plus regarder son ange dans le blanc des yeux si elle revenait sur ces images plus que tentatrices.

Notre miss était allée parler à Phileas, puis en train de se diriger vers le canapé quand Kanon fit son apparition pour lui prendre la main et l’entrainer sur ce dernier. Toute contente, la demoiselle s’assit contre lui, posant sa tête contre son épaule. Elle ne savait pas très bien mentir, mais... ne voulait pas non plus s’en aller, c’était au choix et évidemment puisqu’il l’y conviait, elle secoua sa tête de gauche à droite, lui prenant doucement la main comme pour s’en convaincre elle-même.

« Non, pas ce matin. »

Puis le silence reprit ses droits tandis que Kanon devait surement se torturer à trouver un sujet intéressant pour converser ou bien tout simplement une occupation à deux. La poupée, quant à elle, plongée dans ses pensées ne faisait pas réellement attention, bien trop heureuse d’être à ses côtés, d’être si proche malgré l’interdiction… elle cligna plusieurs fois des yeux pour se concentrer sur ses questions et pencha la tête sur le côté afin de réfléchir. Il était vrai qu’elle n’avait pas réfléchi à son avenir et cela la préoccupait grandement, il fallait qu’elle choisisse quoi faire l’an prochain et… elle avait bien dans l’idée de partir en mode, quelque chose qui pourrait lui permettre d’être styliste. Mais le droit, voie complètement différente lui plaisait tout autant et pour cette raison, elle hésitait, soupirant.

« J’aime… étudier les lois et j’aime aussi dessiner des modèles de vêtements… malheureusement… je ne suis pas sure que je puisse faire les deux. Et toi Kanon ? »

Évidemment, il devait, comme toute personne sur cette terre, qui se respecte, avoir lui aussi quelques envies, quelques passions. Elle l’imaginait sportif, une certitude vue qu’il était assez musclé. Puis elle se souvint qu’elle avait évincé, à quelque chose près la première question qu’il lui avait posée. Un sujet de conversation… en même temps, il n’y en avait pas réellement besoin, ils étaient tellement bien ensemble que les mots n’avaient pas fière allure à côté de leurs regards en coin… Miho ne pouvait définitivement pas se lasser de regarder l’homme pour lequel elle craquait littéralement.

« Kanon… »

Ce n’est pas sans arrières pensés que la demoiselle avait prononcés, une fois de plus le prénom de son cher et tendre, puisqu’elle s’était relevée légèrement, ayant longuement hésité avant de manigancer ce plan. Elle avait attendu qu’il tourne son visage pour pouvoir déposer brièvement ses lèvres sur les siennes. Miho ne voulait pas approfondir, bien qu’elle en mourait d’envie, sa résolution première avait été de goûter à ses lèvres une seule fois, une seule et unique fois. Elle vira évidemment au rouge cramoisi, n’osant plus le regarder, le laissant d’ailleurs reprendre ses esprits. Son cœur s’était emballé. Elle prit le temps de le laisser se calmer lui aussi pour finalement oser briser le vilain silence qui perdurait à s’immiscer entre eux à chaque fois qu’il ne fallait pas pour s’excuser.

« D… désolé… mais… j’avais l’impression que… si je ne le faisais pas… je n’aurais jamais l’occasion de le faire de toute ma vie… c’est promis, je ne recommencerais pas ! »

Voila maintenant quelques secondes qui s’étaient écoulées à une allure réduite, vicieuse comme étaient l’horloge, elle l’avait fait exprès, à tous les coups… un moment si intense qui n’avait duré qu’une demi-seconde alors que ce moment de gêne durait presque trop longtemps en comparaison… pour une même demi-seconde, malheureusement. Elle soupira, soufflant un bon coup puis se leva très lentement pour montrer qu’elle n’allait pas s’enfuir, se dirigeant simplement vers le poisson qui semblait faire des bulles à son intension… elle semblait à présent l’écouter sans grand intérêt pourtant, mais c’était toujours mieux que de risquer une nouvelle fois de sauter sur son ange gardien, alors qu’elle était persuadée qu’elle le regretterait. C’était évident… Miho craignait que son ange soit condamné par sa faute… alors, elle s’en voulait de l’encourager, pourtant, elle en avait besoin.

Bon point pour moi, Miho n’avait pas cours ce matin, on pourrait passer plus de temps ensemble. Je réfléchissais paisiblement à un sujet de conversation, soucieux de bien faire, j’avais toujours peur que Miho s’ennuie avec moi. Non décidément, je ne voyais pas ce qui l’attirait chez moi.

Je lui demandais si elle avait des passions, ce à quoi elle me répondit qu’elle hésitait entre le droit et le stylisme, deux matières en effet, très différente l’une de l’autre, mais qui lui correspondait parfaitement. Elle me retourna la question. Pinçant les lèvres, je ne savais pas trop quoi répondre.

J’étais un peu gêné, un ange gardien n’envisage pas son futur comme un étudiant, mon futur à moi, était déjà tout tracé. Bien que j’aurais été tenté de faire quelques métiers intéressant, je passais mon temps sur les bancs de la faculté, à apprendre des choses qui au final me serviraient jamais. C’était bien triste. Mais pas question de le dire à Miho. Penchant légèrement sur le coté, je m’efforçais de fournir une réponse acceptable.

- Je suis le cursus de littérature étrangère à l’université…donc je passe beaucoup de temps à la bibliothèque. Sinon j’aime beaucoup les films, mais tu le sais déjà ! Quand j’ai du temps, je fais du jogging dans le parc, je t’emmènerais un jour si tu veux.

Petit clin d’œil amusé, j’imaginais déjà le truc et ça pourrait être sympa à faire. Bien qu’en toute honnêteté, je n’étais pas sure qu’elle arriverait à me suivre, mais sait-on jamais.

Elle me regardait et je la regardais. Ces regards auraient pu durer des heures, je ne m’en lasserais pas. Tout comme Eve contemple le fruit défendu, j’avais l’impression que Miho était un peu la pomme empoisonnée. Très belle et attirante, mais dont je ne pouvais pas ressentir les bienfaits à moins de me corrompre. Ce que j’avais déjà bien fait jusqu'à présent.

Elle m’appela, et je me retournais, attendant une phrase…mais je me figeais bien vite. Une alarme dans mon cerveau aurait du se déclencher quand elle se rapprocha rapidement de ma petite personne. Légèrement relevé, je n’eus pas le temps d’esquisser un mouvement, que la jeune nippone avait déposé ses lèvres sur les miennes. Même si le moment fut court, j’eus l’impression que le temps s’arrêtait une nouvelle fois. C’était plus fort, plus magique. Rien à voir avec ce baiser volé dans son sommeil. Là nous étions tous les deux biens conscients.
Elle avait eu le courage qu’il me manquait. Instinctivement, je coupais ma respiration et fermais légèrement les yeux. Jamais je n’avais ressenti quelque chose d’aussi fort. Mon premier vrai baiser. J’oubliais le précédent, il ne valait rien à coté. Ma main effleura gentiment ses reins et vint se placer sur sa hanche.

Mais ses lèvres avaient déjà quitté les miennes, et je retirais ma main, soucieux de ne pas aller trop loin. De ne pas céder à la tentation. C’était nouveau et je sentais au fond de moi, que j’en voulais déjà plus. Heureusement que Miho avait la retenue nécessaire. Les pommettes rouges, elle n’osait plus croiser mon regard. Je sentais que son cœur battait fort, comme le mien à ce moment. J’aurais voulu être capable de dire quelque chose car je n’aimais pas qu’elle se sente mal comme ça. Mais aucun son ne sortait de ma bouche. Que de sentiments confus en moi !

Une fois de plus, c’est elle qui prit l’initiative de briser le silence. Je la laissais terminer sa phrase et fronçais les sourcils. Agacé, je posais un doigt sur ses lèvres, l’empêchant de continuer à s’excuser pour ça. Elle se leva doucement, me montrant qu’elle ne comptait pas s’enfuir, pour se diriger vers Phileas. Assis seul sur le canapé, le vide et la solitude m’envahirent et je ne pu m’empêcher de me lever à sa suite.

Il était important que je choisissent les bons mots, sans qu’il y est de malentendus. Il fallait que j’avoue mes méfaits. Pour lui montrer que ses sentiments étaient partagés. J’avais énormément peur qu’elle s’offusque. Même si je savais que tout ce que j’allais faire ou dire allait finir par l’encourager, que ce n’était pas une bonne chose, ni pour elle, ni pour moi, je ne pouvais rester de marbre. M’approchant, je me plaçais entre elle et le poisson rouge.

- Je veux que tu arrêtes de t’en vouloir pour tout ce que tu fais hum ? J’ai aussi ma part de responsabilité.

Puis, me penchant pour me mettre à sa hauteur, je collais mon front contre le sien.

- Je n’ai pas eu le courage que tu as eu tout à l’heure. Je …je t’ai embrassé pendant que tu dormais. Je comprendrais que tu sois en colère, j’ai fais preuve de beaucoup de lâcheté. J’ignore…je ne sais pas trop comment être proche de toi. Mais si je fais quelque chose de travers, dis le moi s’il te plaît.