13h45. L'ennui total.

Il était plutôt rare pour moi de penser de la sorte, mais aujourd'hui j'avais bien peu de travail et Suo était absent. C'était dans ce genre de jour exceptionnel que je me rendais compte à quel point il animait mes journées.

Mon regard passa sur la salle vide de mon bureau. Le buffet qui servait de coin pour le thé lui-même semblait s'ennuyer à mourir sans son principal utilisateur. Je me levai et fis les 400 pas dans mon bureau en regardant alentour. Il faisait beau dehors. Pas même un zéphyr. Le monde était bien calme aujourd'hui.

Un peu trop même.

Je n'étais plus habituée à cette paix. Ces derniers temps avaient été plus agités que prévu, notamment avec l'apparition de nouveaux éléments perturbateurs dans la partie d'échecs. Et pas que de maigres pions.

Soudain, quelque chose m'interpella. Une énergie ? Non, c'était trop faible. Une aura ? Oui. Une aura plutôt agressive. Encore que je la sentais loin, l'intensité en était donc diminuée. Donc, correction : une aura très agressive. D'où provenait-elle ?

Sortant de mon bureau, je jetais un œil dans le couloir, la direction de mon regard dirigeant mes sens à la recherche de l'aura. Je baissais les yeux. Cela venait de plus bas.

Me dirigeant vers l'ascenseur, je fus contraint de saluer un bon nombre de mes employés, apparemment surpris de me voir sortir de mon bureau. Fait plutôt rare en effet. J'envoyais toujours Suo me chercher des dossiers pendant que je gardais le nez dans mes papiers. Néanmoins, leurs voix résonnèrent comme un écho au loin, ma concentration étant à son paroxysme pour ne pas perdre la trace de cette aura intrigante. Je ne perçus même pas le temps passer dans l'ascenseur. Les chiffres défilaient sur l'écran à cristaux liquides, tandis que je sentais l'aura prendre de l'ampleur. Je m'en rapprochais.

A la sortie de l'ascenseur, les employés s'écartèrent et me laissèrent passer avec des courbettes. La plupart ne savaient même pas que j'étais leur patron car ils travaillaient dans les plus bas étages de l'administration, mais mon aura - même invisible à leurs yeux - leur faisait ressentir mon importance. Et j'étais incapable de la cacher.

Je m'avançais alors dans le hall, passant les portiques de sécurité à champ magnétique sous le regard des vigiles qui ne s'excitaient bizarrement jamais pour quelqu'un "sortant" de l'entreprise, et je regardais alentour. Cette aura était monstrueusement agressive. La tête commençait à m'en tourner. Je n'avais pas ressenti de haine à ce point depuis... des centaines d'années. Quel être humain pouvait cultiver une émotion d'une telle ampleur et réussir à la conserver sans la montrer ?!

Immobile au milieu de la foule qui entrait et sortait du bâtiment, j'étais au moins sûr d'une chose : qui qu'il soit, cette personne ne tarderait pas à me repérer très facilement.

Pendant tout ce temps, je n’avais pas arrêter de scruter les alentours. Cet endroit me donnait la nausée, mais il fallait que je contienne ma rage, car j’allais me faire repérer. Je regardais les gens passer un à un. Je m’étais un peu mise sur le côté, près d’un mur et d’une plante verte. Je me demandais bien si j’avais le pouvoir de la rendre en cendre. Cette pensée me fit sourire. Mais le bruit des portes de l’ascenseur me sortit de mes pensées morbides. Les employés s’inclinait tous un à un, en laissant passer un homme. C’était lui, je le ressentais à des kilomètres. Il semblait chercher quelque chose ou quelqu’un. M’avait-il repérer ? Avait-il capter mon aura ? Il se rapprochait des vigiles, scrutant tous ceux qui passait. Effectivement il me cherchait, mais ça m’amusait de brouiller ses pistes. Ces anges se croyaient fort et intouchable au sommet de leur tour. Mais même si ça me prendrait des années, je les emploierais à tout rentre à néant. C’est dans ces moments là que j’étais contente que Ju Shin ne soit pas avec moi. Il était un ange lui aussi, même si il leur tournait le dos pour m’aider, car c’était son rôle. Je suis sur qu’il me l’aurait reprocher d’avoir franchi les limites et d’être rentrer dans leur lieux. Le hall commençait à se vider, il ne restait plus que lui et moi. Je sortis de mon coin et me rapprocha doucement vers lui. Cette aura, son aura me donnait envie de l’étriper, mais je n’en fis rien.

- Vehuiah !! Ravie de vous rencontrez

Car oui je le connaissais, grâce à ce don que ma mère m’avait transmis, j’arrivais tous à les percer à jour et connaitre leur identité. Je le sentis défaillir, ce qui me fit sourire encore plus.

- Je ne pensais pas vous voir en personne, mais cela ne me dérange pas tant que ça.

Les regards étaient braquer sur nous deux, mais peu importe, j’avais réussi là où certains avaient échoué. Je connaissais l’identité de mon ennemi. Certes pensent que la raison pour laquelle je travaille en tant que serveuse c’était pour me faire des amis, au contraire, cela me permettait d’être en contact directe avec mes ennemis, me renseigner sur eux, savoir à quoi il me serait utile. Même si Ju Shin savait beaucoup de chose sur moi, je lui avais volontairement café que je travaillais dans le club d’hôtes, car le connaissant il aurait voulu me sermonner. Mais je pense qu’il est quand même au courant. Les nouvelles vont vite sur Terre.

- Vehuiah !! Ravie de vous rencontrer.

Je me figeais à l'instant. La voix venait de derrière moi, mais je ne me retournais pas. Le son de mon véritable nom m'avait attend comme un coup de gong et se propageait en moi comme un courant électrique. Lorsqu'il m'eut envahit complètement, j'eus comme un malaise et ma vue se troubla un instant. Surprenant. Même un ange de mon rang pouvait être violé par la prononciation de son nom véritable. C'était la première fois que j'expérimentais ce genre d'impression Ce qui me parut plutôt dérangeant sur le coup. Mais savoir que moi-même n'était pas infaillible me fit presque plaisir. J'eus une brusque pensée pour Kei. Je me dis que ce genre de sensation lui aurait plu, lui qui s'ennuyait tant.

- Je ne pensais pas vous voir en personne, mais cela ne me dérange pas tant que ça.

Je me retournais lentement pour faire face à mon "agresseur". Mes yeux s'arrondirent un instant. Pas assez pour qu'elle le remarque, mais j'étais sidéré. Se tenait face à moi une jeune femme, frêle... mais dont les yeux dégageaient tant que je compris vite qu'il s'agissait de la source de l'aura que j'avais senti.

Comment un corps aussi jeune et chétif pouvait-il contenir tant d'agressivité ?...Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas questionné sur un être humain.

- Nous nous connaissons ? tentais-je innocemment. Je ne crois pas avoir eu le plaisir d'avoir été présenté.

Malgré sa frêle stature, la jeune femme se tenait droit, ferme sur ses deux jambes. Sa confiance en elle à cet instant précis m'intima le respect. Néanmoins, un être humain sachant le nom d'un ange était tout sauf inoffensif... surtout quand il dégageait autant de colère. Il était hors de question que je la laisse partir ainsi. D'une part, sans savoir comment elle avait su prononcer mon nom, dont même la sonorité est une souffrance pour la personne qui le prononce. Et d'autre part, pourquoi cette aura de haine m'était dirigée.

- Peut-être auriez-vous un instant pour prendre le thé ? continuais-je poliment. Le café de l'autre côté de la rue en a fait sa spécialité depuis peu.

... Passons sur le fait que je voulais la faire sortir de cet endroit. Elle ne tarderait pas à être repérée par un autre ange, et qui ne serait pas forcément aussi délicat avec elle. Prendre le risque d'une altercation était à éviter. Surtout depuis que des regards inquisiteurs dont je soupçonnais l'appartenance nous fixaient.

L'odeur du thé me manquait aujourd'hui.

Etre en position de supériorité, même si ça ne dure qu’un instant, ce sentiment, je l’apprécie. C’était pour cela que je souriais, d’un air calme et détaché. Les hostilités pouvaient commencer. Bien que j’étais du genre à agir et foncé tête baisser, je savais qu’attaquer la première, ce n’était pas une bonne chose, d’où le jeu de la gentillesse..enfin gentillesse c’était beaucoup dire. Il fallait juste que je m’empêche de partir en vrille, sinon ma mission aura échouer. Vehuiah était toujours dos à moi. Je pouvais ressentir sa faiblesse, cette peur qu’il avait, de voir qu’un humain, connaissait sa réelle identité. Et il fallait que je protège la mienne du mieux que possible, quitte à jouer le rôle de la fille douce et naïve, histoire de brouiller mon aura, qui dégageait une haine inconsidérable, mais c’était très dure.

- Nous nous connaissons ? Je ne crois pas avoir eu le plaisir d'avoir été présenté.

Effectivement nous ne nous connaissons pas…enfin vous ne me connaissez pas, car je connais tout de vous, de votre race qui n’hésite pas à tuer de parfait innocent, juste pour leur plaisir personnel. Je ne sais pas qu’est-ce qui me retenait de le frapper…Maman, je sais que tu souffres là où tu es, mais soit encore patiente, je te vengerais, toi et Aïko et papa.

- Peut-être auriez-vous un instant pour prendre le thé ?. Le café de l'autre côté de la rue en a fait sa spécialité depuis peu.

Il voulait vraiment me fiche à la porte hein ! Mais insister pour rester ne serait pas une très bonne chose, je me ferais tout de suite démasquer. Il fallait que je l’a joue fine, que toutes ses années à faire du théâtre me servent à quelques choses.. Et action !!!

- Désolé, je m’appelle Yamane Aria - dis-je en m’inclinant poliment- Je m’excuse de vous avoir déranger. Je pensais rencontrer un des employés qui s’occupe des ressources humaines. Mais je suis très flattée de vous rencontrer en personne.

Et oui, j’étais plutôt bonne actrice, c’était une voie que j’avais envisagé de prendre, mais la mort de mes parents m’empêcha de réaliser ce rêve. Donc au lieu de jouer sur les planches, j’allais être mon propre réalisateur, écrivain du script, metteur en scène et actrice principale. Un sacré promotion me direz vous. Je me rapprocha de lui, toujours ce magnifique sourire sur les lèvres.

- Je serais ravie de prendre une tasse de thé en votre compagnie. D’après ce que j’ai entendu vous êtes un grand amateur de thé. Ca me ferait plaisir de vous en offrir une bonne dégustation. Encore une fois, je m’excuse d’être venue ici de façon impromptue.

Je m’inclinais encore une fois, serrant fort les dents afin de ravaler ma colère et la dissiper au plus vite.

- Désolé, je m’appelle Yamane Aria, me répondit-elle poliment. Je m’excuse de vous avoir dérangé. Je pensais rencontrer un des employés qui s’occupe des ressources humaines. Mais je suis très flattée de vous rencontrer en personne. Je serais ravie de prendre une tasse de thé en votre compagnie. D’après ce que j’ai entendu vous êtes un grand amateur de thé. Ca me ferait plaisir de vous en offrir une bonne dégustation. Encore une fois, je m’excuse d’être venue ici de façon impromptue.

Cette jeune fille paraissait tout à fait sincère dans ses éloges... mais son aura était trop agitée que je la crus un instant. Elle n'était pas venue ici pour visiter, mais bel et bien pour repérer. Qui, quoi, je n'en avais pas la moindre idée. Seule mon empathie envers les êtres vivants me permettaient de déceler qu'elle me mentait. Mais quelles qu'est pu être ses intentions, je savais que je devais à tout prix la faire sortir d'ici. Plus que son aura agressive qui la mettrait en danger, je commençais à redouter les réelles motivations qui l'animaient.

J'acquiesçais donc.

- Ne vous excusez donc pas et oublions tout ceci, commençais-je en battant l'air de la main un court instant. Je vais plutôt profiter de votre proposition pour me faire offrir une tasse de thé en charmante compagnie. Si vous voulez bien le suivre.

Je me postais à ses côtés, lui proposant mon bras avec élégance. Les japonais n'étaient pas bien habitués à ce genre de pratique. Elle était réservée aux couples s'affichant en public. En jeune japonaise, je savais que l'invitation l'intriguerait et qu'elle se poserait des questions. Mais j'espérais bien qu'elle continue son petit jeu de politesse et me donne son bras en souriant. Tout était calculé. Elle ne l'ignorait peut-être pas, mais le contact accroit mes capacités de perception... et je voulais à tout prix plonger dans cette énergie agressive afin d'en trouver le fond, et qui sait, la source.

- Ne vous excusez donc pas et oublions tout ceci. Je vais plutôt profiter de votre proposition pour me faire offrir une tasse de thé en charmante compagnie. Si vous voulez bien le suivre.

Il me prenait vraiment pour une imbécile hein ? Me tendre son bras, je savais bien que ce geste avait quelque chose derrière. Aucun japonais qui se respecte ne ferait ce genre de chose, en plus avec une inconnu. C’est pour ça que j’étais un peu fasciné par les mœurs européens. Ils étaient moins coincé que nous les asiatiques, enfin on est pudique c’est autre chose. L’espace d’une seconde, je fermais mes yeux, histoire de faire le vide dans mon esprit, avant d’accepter sa proposition. Je rempli ce vide avec plein de bonne intention, de joie et autre trucs niais et lui fit un sourire avant de passer mon bras autour du sien. Il fallait que je joue mon rôle à fond. Mais je n’avais pas prévu la suite. Un bruit assourdissement résonna dans mon oreille, me faisant lâcher son bras et me plier légèrement vers l‘avant, les mains sur les oreilles. Ca n’avait dure qu’une fraction de seconde, mais l’intensité était extrême. Je n’avais jamais ressenti quelque chose pareil. Il me fallut quelqu’un instant pour m’en remettre et lever la tête vers Vehuiah. C’était lui, c’était à cause de son aura que j’avais ressenti cette douleur. Mais qu’est-ce que ça signifiait ? Était-ce une signe pour que je flanche ? Il en était hors de question. Je pris une profonde respiration. Je savais bien que mon attitude soudaine avait du éveiller les soupçons de l’ange. Mais je ne devais rien laisser paraitre de ma faiblesse.

- Je suis vraiment désolé..J’ai souvent des migraines ces derniers temps, ça me prend d’un seul coup…Désolé d’abuser de votre gentillesse, mais pourrais-je avoir un verre d’eau s’il vous plait ?

Je venais de comprendre, cette douleur était prévu pour que je passe un peu plus de temps ici. Ca pourrait me permettre de repérer les gens qui tournaient autour de ce building et ceux qui y travaillaient. Ange ou pas, le travail était toujours dur et un peu de détente n’était pas mal, donc forcement, j’étais susceptible d’en croiser un ou deux à mon travail. Comme quoi il y a du bon dans la douleur.

La jeune fille ne répondit pas immédiatement à mon offre. Hésitait-elle ? Très certainement. Ce qui me prouvait d'ores et déjà qu'elle devait en savoir assez long sur les êtres surnaturels. Elle ferma les yeux un instant, comme pour penser calmement à mes propos. J'imaginais son dilemne : accepter de se laisser lire pour feindre l'innocence ou refuser de laisser le champ libre à mon pouvoir et définitivement attirer les soupçons. Pas une mince affaire... mais qui commençait à me faire perdre patience.

Profitant de son hésitation, je dirigeai mon esprit vers le sien. Mon aura allait s'intensifier, ce qui risquait d'intriguer mes employés se trouvant dans le bâtiment. Mais au diable la considération ! Je ne m'introduirai pas dans ses pensées pour les lire. Il y a longtemps, je fis le serment de ne plus jamais lire l'âme des humains, sauf en cas d'extrême urgence. Cela incluait leur savoir, leurs souvenirs, leurs émotions profonde et leur inconscient. La raison en était que je respectais les humains ; assez pour ne pas prendre le risque de les tuer en entrant dans leur esprit. Néanmoins, j'espérais pouvoir effleurer les pensées de cette jeune femme pour en apprendre assez sur ses intentions.

Lorsqu'elle me donna enfin son bras, le contact fut violent. En une fraction de seconde, des milliers de sons, d'images et d'émotions me parvinrent. Des rires, des couleurs, des émotions joyeuses... Etrange. Un esprit empli de bonnes choses et dont l'agressivité semblait en totale contradiction avec ce que je ressentais. Puis dans ce flou de pensées, un cri déchirant de désespoir. Soudain le contact cessa. La jeune femme chancela et avait lâché mon bras.

- Je suis vraiment désolé. J’ai souvent des migraines ces derniers temps, ça me prend d’un seul coup…Désolé d’abuser de votre gentillesse, mais pourrais-je avoir un verre d’eau s’il vous plait ?

Des gens - humains en majorité - s'arrêtèrent pour observer la scène. Forcément, une personne faisant un malaise attirai l'attention des badauds, surtout dans un endroit aussi strict que la Kronos Heaven. J'en étais le premier responsable.

Il était temps de s'isoler.

J'éteins mes sens d'ange pour les enfouir profondément dans mon corps humain et pris le bras de la jeune femme pour la soutenir.

- Je vais vous conduire dans un endroit tranquille et vous servir de l'eau. Tenez bon mademoiselle. lui dis-je calmement en la conduisant avec précaution vers la salle d'attente.

Par chance, celle-ci était vide à cette heure-ci. Je fis asseoir la jeune fille dans un fauteuil et rejoignis le distributeur d'eau. En silence, je pris un gobelet et le remplis d'eau fraiche avant de revenir vers la jeune femme, assise, la main sur la tempe. J'étais désolé de lui avoir imposé de la souffrance. Preuve que je ne me maîtrisais pas encore assez...

- Qu'êtes-vous venue chercher ici mademoiselle Yamanade ? lui demandais-je en lui tendant la boisson. Nous ne sommes plus en public. Vous pouvez jouer franc jeu.

Car il était temps de faire tomber les masques. J'avais pour devoir de protéger les miens, mais je ne voulais pas être forcé de lui faire du mal. Plus encore, je voulais connaître cette jeune femme ; savoir pourquoi elle abritait autant de colère.

- Je vais vous conduire dans un endroit tranquille et vous servir de l'eau. Tenez bon mademoiselle

Je le suivis sans protester vers la salle d’attente. En même temps, plus je restais ici, plus il serait facile pour moi de capter les informations et les auras dont j’avais besoin. Je me saisis du gobelet et bu une gorgée d’eau. Certes ça n’agirait pas sur cette violente douleur.

- Qu'êtes-vous venue chercher ici mademoiselle Yamanade ?. Nous ne sommes plus en public. Vous pouvez jouer franc jeu.

J’esquissa un léger sourire, avant de vider le contenu du gobelet et le poser sur la chaise qui se trouvait à côté de moi. Il était temps de passer aux choses sérieuses et ce dont pourquoi elle était venu.

- D’abord, merci pour l’eau, ça m’a fait beaucoup de bien. Et je ne penses pas que savoir mon identité vous sera bénéfique. Le plus important c’est que je sais qui vous êtes, et ce que votre race s’amuse à faire.

Malgré les choses que j’avais dites, j’étais rester très calme. M’énerver ne servirait à rien, surtout ici. J’étais dans leur élément, leur lieux qu’ils maitrisaient. Et tenter quelques choses ici serait vraiment de la folie. Bien que ça me ressemblait d’agir impulsivement, j’étais trop faible physiquement pour me lancer. Je me leva donc et me posta devant Vehuiah, toujours en souriant, je frôla doucement sa joue avec ma main.

- La seule chose que vous avez besoin de savoir, c’est que j’ai beaucoup souffert, et je comptes demander justice et réparation. N’est-ce pas légitime de la part de quelqu’un qui a perdu sa famille et ça juste pour l’honneur d’une tierce personne ?

Je m’étais rapprocher de lui, effleura ses lèvres avec les miennes. Certes je n’étais pas séductrice de nature, mais il fallait faire avec les moyens du bord et je n’avais que ça pour semer le trouble dans l’esprit de l’ange. Tant d’émotions différentes portent à confusion et s’est, ce que je voulais. Dans une dernière tentative, j’en profita pour l’embrasser pour de bon, avant de me reculer.

- On se reverra bientôt, vous pouvez en être sur !

J’avais réussi la première étape. Vehuiah était loin d’être l’ange intouchable et fort comparé à ceux qui régnait plus haut. Certes jouer avec lui serait sûrement facile. Mais je devais quand même rester sur mes gardes. Car cette douleur violente c’était à cause de lui et qui sait ce qui pourrait faire de plus. Je risquais ma vie à chaque mission, mais c’était pour la bonne cause.

Je commençais à cerner ce à quoi cette jeune femme me faisait penser depuis que j'avais entamé la conversation avec elle : de l'eau. Elle était pareille à l'eau d'une rivière dont la surface s'écoule calmement, mais qui cache moult remous en son sein. Malgré ma franchise, elle demeurait de marbre, ne montrant extérieurement aucun signe de sa colère.

- D’abord, merci pour l’eau, ça m’a fait beaucoup de bien. Et je ne penses pas que savoir mon identité vous sera bénéfique. Le plus important c’est que je sais qui vous êtes, et ce que votre race s’amuse à faire.

Elle se leva et s'approcha de moi. Tendant la main, elle effleura mon visage, entre le toucher et l'abstention, comme si elle tentait de me mettre sous tension. Certes, tout être humain aurait eu du recul ou aurait succombé à une tentation si douce. Mais je n'étais pas humain. Je pouvais comprendre leurs sentiments, mais non les ressentir. Néanmoins, je commençais à perdre patience. Je sentais qu'elle ne me dirait rien, même si j'agissais avec toute la politesse du monde. Mais plus encore, le ton de sa voix dans sa dernière réplique me fit comprendre tout le ressentiment qu'elle avait envers les anges. Des images de sang et de violence m'étaient parvenues lorsqu'elle avait prononcé ces mots. Était-ce donc cela qu'elle voyait en nous ? Des meurtriers ?

- La seule chose que vous avez besoin de savoir, c’est que j’ai beaucoup souffert, et je comptes demander justice et réparation. continua-t-elle en approchant son visage du mien, ses lèvres au plus près des miennes. N’est-ce pas légitime de la part de quelqu’un qui a perdu sa famille et ça juste pour l’honneur d’une tierce personne ?

Ces derniers mots étaient chuchotés, comme si elle essayait de faire glisser ses paroles dans mon esprit pour me convaincre. Je me dis alors que cette jeune femme serait prodigieuse dans ce que les humains appellent "l'hypnose". Sa voix et tout son être avaient la faculté de faire passer un message. Je le recevais. Mais Aria avait sous-estimé ma nature.

N'ayant aucun mouvement de recul et la regardant faire, droit dans les yeux, je commençais à me poser des questions. Était-il dans mon intérêt que d'en apprendre plus maintenant sur cette demoiselle ? Je devrais avoir recours à des moyens plus agressifs pour en savoir d'avantage et il allait de soit que cela n'améliorerait pas sa vision des anges. Les questions allaient demeurer : Bien que je commence à me douter de la source de cette haine, d'où provenait cette conviction que les anges étaient des créatures du malin ? Pourquoi était-elle venue ici aujourd'hui ? Et par-dessus tout, comment un être d'une telle faiblesse pouvait renfermer autant de force en lui ?

La jeune femme s'étira pour mettre ses lèvres au contact des miennes. Cela faisait longtemps que je n'avais pas eu ce genre d'étreinte et l'impression que cela me fit se résumait en un mot : nostalgie. Un sentiment humain que je leur enviais. Le doux souvenir d'un événement agréable apportait la paix à l'esprit, mais malheureusement, cette émotion était difficile après des milliers d'années d'existences.

Aria se recula avant que j'ai pu faire le tour de mes pensées.

- On se reverra bientôt, vous pouvez en être sur ! me dit-elle comme si rien ne s'était passé en s'éloignant vers la porte.

Je la retins par le bras et la forçais à revenir vers moi, prise par mon élan. La saisissant par la taille, je la rapprochais de moi et l'embrassais à mon tour. Surprise par ma réaction, Aria ne remarqua sans doute pas que je lui insufflais un peu de moi dans son corps frêle et fragile. Lorsque ce fut fait, j'admets avoir prolongé le contact pour ressentir à nouveau ce sentiment de nostalgie. Absolument magnifique.

Brisant le contact, je la regardais dans les yeux, calmement, à l'instar de l'eau calme qu'elle représentait.

- Nous nous reverrons certainement ma chère, lui dis-je au plus près en la relâchant lentement. Et je jure de vous prouver que les anges sont doués d'amour et de bonté autant que vous autres mortels.

Ce n'était pas un mensonge. Bien que ce baiser n'eut été qu'un prétexte pour la marquer à vie de mon énergie, les anges éprouvaient de l'amour envers ceux qu'ils protégeaient, ceux qui partageaient leur cause, et celui qui les avait créé.

Et quiconque en ce monde n'en serait pas persuadé, j'allais le lui prouver.

Le mouvement fut rapide. Bien que je ne m'y attendais pas, je n'émis aucune protestation. Cela montrait que les anges étaient aussi des joueur, plus vicieux que les humains. Venait-il de se trahir tout seul ? On aurait bien dit. Mais ce serait mentir que de dire que le contact n'était pas agréable. Mais il ne fallait pas que j'oublie qu'il était mon ennemi, et se lier avec son ennemi, c'est une trahison pour la cause que l'on défend. Déjà que j'avais laisser un d'entre eux rentrer dans ma vie, je ne pouvais pas me permettre d'en laisser un autre venir semer le trouble en moi. Le trouble ? Voilà ce que j'avais ressenti lorsqu'il m'embrassa. Mais la vengeance et la haine étant des sentiments plus fort que l'amour, je repris vite mes esprits.

- Nous nous reverrons certainement ma chère. Et je jure de vous prouver que les anges sont doués d'amour et de bonté autant que vous autres mortels.

De qui se moquait-il ? Faire preuve de bonté et d'amour ? Aller raconter ça aux enfants qui ne sont pas en âge de comprendre mais pas à moi, surtout pas à moi. Je n'avais qu'une envie, c'était du hurler à plein poumon pour me vider de toute la colère que je contenais en moi. Hurler, frapper, casser tout ce que je trouverais.

- Faire preuve d'amour ? Ne vous moquez pas de moi. Vous trouver que c'est faire preuve d'amour que de tuer une femme enceinte ainsi que son mari ? De laisser deux petites filles orpheline à vie, avec ce sentiment ? Vous savez la douleur, la peine que ces enfants ont ressenti ? Non vous ne savez rien de cela alors ne venez sûrement pas me dire que vous savez faire preuve d'amour et de bonté.

Cette dernière partie de ma phrase, je l'avais dite en haussant la voix, presque en criant. Cela ne me ressemblait pas de m'énerver comme ça, mais c'était vraiment la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase. Je sentais quelques larmes couler sur ma joue et les essuyait d'un mouvement sec et violent. Le poing serrer, les ongles qui rentraient dans ma chairs, il fallait que je me calme et c'est ce que je fis en écrasant violemment mon poing dans le mur. Bien que mes phalanges étaient blesser, je ne ressentais aucune douleur

Ma réplique la fit réagir. Enfin ! Elle s'éloigna en me dédiant un regard fixe et outrageusement sérieux.

- Faire preuve d'amour ? Ne vous moquez pas de moi. commença-t-elle d'une voix un degré plus haute que précédemment. Vous trouver que c'est faire preuve d'amour que de tuer une femme enceinte ainsi que son mari ? De laisser deux petites filles orpheline à vie, avec ce sentiment ? Vous savez la douleur, la peine que ces enfants ont ressenti ? Non vous ne savez rien de cela alors ne venez sûrement pas me dire que vous savez faire preuve d'amour et de bonté.

Sa voix avait grimpé en intonation, trahissant son émotion contenue. Des larmes lourdes et pleines de sens roulèrent sur ses joues. Se rendant compte de ses pleurs, elle les essuya d'un geste sec et se retourna vers le mur pour le cogner avec force. Le choc du poing sur le mur faillit m'arracher un sursaut. Le bruit sourd était plus fort que ce à quoi je m'attendais de la part d'une jeune femme. Elle avait plus de poigne que je ne l'imaginais.

Je m'approchais alors lentement, passant de son dos à son côté pour tenter d'apercevoir son visage. Il contemplait son poing, en sang. Je lui pris la main avec douceur. Elle eut un mouvement de recul mais je renforçais un peu ma prise pour la tourner vers moi et pouvoir examiner sa main. La peau s'était arrachée sur les articulations de ses phalanges. Au dessous la chair était rouge, filandreuse et si similaire à... celle d'un animal blessé.

Passant mes doigts sur les blessures, j'y distillais un peu de mon énergie. La cicatrisation en serait accélérée. Pas assez pour que cela paraisse suspect, mais suffisamment pour que lorsque je la laisserai partir de cette salle, plus rien ne laisse deviner qu'elle s'était blessée.

- L'amour, la bonté, la générosité, l'altruisme... dis-je d'une voix douce en caressant sa main blessée. Nous en sommes tous capables. Puis relevant les yeux, je rencontrai son regard. Nous sommes tous capables du pire comme du meilleur, mais ce sont nos choix qui dirigent nos actes.

Je me tus un instant, mon regard dans le sien, tentant d'atteindre ses émotions de mes mots et de ma voix. Couvrant sa main blessée de la mienne, je continuais :

- Confiez-vous à moi. Faites sortir votre haine. Vous êtes une création de la Terre et du Ciel. Cette colère vous détruira de l'intérieur... Quel gâchis.

Ma voix ne l'avait pas calmée, mais elle m'écoutait désormais. Son calme ne tenait qu'à un fil, maintenu par le contact de nos regards, plongés l'un dans l'autre, s'observant, tentant de décider si l'autre était franc.

Progressivement, je la fis asseoir et m'agenouillais devant elle, sans briser ce contact. Dusse-t-elle en connaître beaucoup sur les anges pour savoir qu'un séraphin ne s'agenouille jamais devant un être qui lui est inférieur dans la hiérarchie céleste. Je doutais qu'elle le sache et par conséquent qu'elle s'émeut de ce geste prouvant la bienveillance que j'avais à son égard. Cependant, je pris le risque d'aller plus loin.

- Dites-moi, lui dis-je enfin en posant une main sur sa joue mouillée. Que vous est-il arrivé. Qui était cet ange malfaisant. Dites le moi.

- Confiez-vous à moi. Faites sortir votre haine. Vous êtes une création de la Terre et du Ciel. Cette colère vous détruira de l'intérieur... Quel gâchis.

Se confier à lui ? Elle était bonne celle là. Déjà je ne suis pas quelqu’un qui aime se confier et encore moins à son ennemi. Il ne semblait pas réaliser la gravité de la situation là. Bien qu’il se disait être différent des autres. Ce n’est pas pour autant que je lui faisais confiance, loin de là. Tous les hommes sont mauvais, même ceux qui disent prêcher le vrai. Ne jamais croire quelqu’un à 100% et se méfier de tout le monde. Tel était ma façon de vivre.

- Dites-moi Que vous est-il arrivé. Qui était cet ange malfaisant. Dites le moi.

Franchement, si je savais qui il était, vous pensiez que je serais encore debout ici ? Il y a longtemps que je l’aurais fait subir les pires châtiments. A côté de ça, l’enfer serait un club de vacances. Quitte à périr dans les bas-fonds souterrains, je les ferais souffrir au centuple.

- Vous croyez que je serais rester les bras croisé ici, si je savais qui était la cause de toute ma rage ?

Je me mis à soupirer. Rester ici ne servirait à rien, juste à me mettre encore plus hors de moi et je risquerais de dire des choses trop importantes qui risqueraient de mettre en péril ma mission. J’avais miser trop gros pour perdre aussi facilement. Ca ne me ressemblait pas de reculer devant l’ennemi. Mais parfois battre en retraite permet de mieux bondir et attaquer par la suite. Il fallait que je sorte d’ici. Je sentais déjà mon corps s’affaiblir. Ce genre de sentiment m’arrivait seulement quand j’étais en présence d’ange, comme avec Ju Shin. Mais avec lui c’était différent, car quand je me sentais désarmé, j’avais tendance à devenir désagréable et il finissait par capituler. Mais ici c’était différent. J’étais dans un endroit entourer d’anges.

- Merci encore pour l’eau… Sur ce, je pense que ma présence ici a durer trop longtemps.

Aria soupira, visiblement exaspéré par mes propos.

- Vous croyez que je serais rester les bras croisé ici, si je savais qui était la cause de toute ma rage ?

Son aura changea alors, traduisant de la nervosité. J'étais curieux d'en savoir plus sur elle, mais quelque chose me dit que je ne devais pas la retenir plus longtemps.

- Merci encore pour l’eau… Sur ce, je pense que ma présence ici a duré trop longtemps.

J'acquiesçais doucement. Malgré toute la sympathie que je pouvais avoir pour cette jeune mortelle à laquelle la haine ne seyait pas, un chasseur de moins dans mon bâtiment me permettrait d'avoir l'esprit plus tranquille.

- Je ne vous retiens pas. lui dis-je doucement.

La jeune fille tourna les talons pour rejoindre la porte, mais je l'arrêtais.

- Aria !

Elle s'arrêta, sans se retourner vers moi, le regard fixe vers la sortie devant elle. Je m'étonnai même qu'elle n'ait pas continué sa route.

- Sachez seulement que vous avez mon soutien. Si l'envie vous en prend, revenez me parler.

Elle abaissa légèrement la tête comme digérant mes paroles. Je doutais qu'elle se souvienne de ma proposition. Sa haine des anges était trop forte. Mais son désarroi m'avait touché et j'espérais qu'elle se souviendrai de la générosité que je lui témoignais. Un bien vague espoir, mais je voulais y croire, la regardant quitter la pièce d'un pas lent, cachant mal son empressement.

Soupirant, je fermai les yeux et suivis son aura alors qu'elle disparaissait dans la foule de mortels arpentant les rues.

- Nous nous reverrons Yamane Aria. Nous nous nous reverrons certainement...

FIN DU TOPIC